L'inculpation de l'ex-chef de la junte guinéenne Moussa Dadis Camara dans le cadre de l'enquête sur le massacre d'opposants dans un stade de Conakry en septembre 2009 s'assimile à "une instrumentalisation de la justice", a estimé jeudi le chef de file l'opposition guinéenne, Cellou Dalein Diallo.
Le capitaine Moussa Dadis Camara, en exil au Burkina Faso depuis 2010, a été inculpé mercredi à Ouagadougou pour "complicité d'assassinats, séquestrations, viols, coups et blessures" par des magistrats guinéens enquêtant sur le massacre du 28 septembre 2009, alors qu'il était chef de la junte militaire au pouvoir.
Cellou Dalein Diallo, chef de l'Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) a souligné que cette inculpation intervenait après l'annonce en mai par Moussa Dadis Camara de son intention de rentrer en Guinée pour se présenter à l'élection présidentielle (dont le premier tour est prévu le 11 octobre), ainsi qu'après l'alliance électorale scellée en juin avec lui, prévoyant un accord de désistement au second tour.
"J'ai toujours lutté contre l'impunité mais je suis contre l'instrumentalisation de la justice à des fins politiques. Et c'est ce qui arrive malheureusement depuis que Dadis a décidé de s'engager en politique, qu'il a décidé de nouer une alliance avec l'UFDG", a déclaré à l'AFP M. Diallo.
Depuis lors, "les choses se sont accélérées curieusement et la mission des juges qui est partie à Ouagadougou a été envoyée par les autorités du pays pour inculper Dadis", a-t-il dit.
Cellou Dalein Diallo faisait partie des blessés lors de la violente répression du rassemblement pacifique du 28 septembre 2009 alors organisé pour protester contre la candidature à la présidentielle de Moussa Dadis Camara.
Au moins 157 personnes avaient été tuées et plusieurs dizaines sont portées disparues depuis, selon un rapport de la Commission internationale d'enquête de l'ONU. De même source, au moins 109 femmes avaient aussi été violées dans le stade et ses environs.
D'après son avocat Me Jean-Baptiste Jocamey Haba, Moussa Dadis Camara devrait être de nouveau entendu lundi par les juges guinéens à Ouagadougou.
Diverses sources judiciaires et au sein des ONG de défense des droits de l'Homme avaient fait état d'une vingtaine d'inculpations prononcées contre des militaires et des civils dans le cadre de l'enquête judiciaire guinéenne, ouverte en 2010.
"Au moins 14 personnes ont été inculpées et plus de 500 témoins clés et victimes ont été auditionnés" dans le cadre de l'enquête, a déclaré la procureure de la Cour pénale internationale (CPI) Fatou Bensouda le 4 juillet à l'issue d'une visite à Conakry.