Le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) et les forces de maintien de la paix des Nations unies devraient de « toute urgence prendre des mesures pour arrêter » le général Sylvestre Mudacumura, sous le coup d'un mandat d'arrêt émis il y a trois ans par la Cour pénale internationale (CPI).
L'appel a été lancé par Human Rights Watch (HRW) dans un communiqué publié lundi à Goma, capitale provinciale du Nord-Kivu, dans l'est de la RDC, où les forces sous le commandement du chef rebelle hutu rwandais continuent, selon l'organisation, de commettre de graves exactions contre des civils.
Le mandat d'arrêt visant le commandant militaire des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR) a été émis par la CPI le 13 juillet 2012, pour neuf chefs d'accusation de crimes de guerre commis dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, dans l'Est congolais.
Parmi ces crimes, figurent des attaques contre des civils, des meurtres, des mutilations, des traitements cruels, des viols, des actes de torture, des destructions de biens, des actes de pillage et des atteintes à la dignité de la personne.
« Les combattants des FDLR sous le commandement de Mudacumura ont perpétré certaines des pires atrocités commises dans l'est de la RD Congo, et pourtant peu d'efforts ont été faits pour l'arrêter », a regretté Kenneth Roth, directeur exécutif de Human Rights Watch. « Avec Mudacumura toujours en liberté, les combattants des FDLR continuent de commettre des crimes épouvantables contre une population qui souffre depuis longtemps», a ajouté l'activiste.
S'appuyant sur des recherches menées au cours des trois dernières années, Human Rights Watch affirme que des combattants des FDLR ont tué au moins 94 civils, violé des dizaines de femmes et de filles, recruté par la force des enfants dans leurs rangs, kidnappé des personnes pour obtenir une rançon et détruit de très nombreuses maisons depuis l'émission du mandat d'arrêt à l'encontre de Mudacumura.
Corps décapités
En outre, accuse encore l'organisation, des personnes qui ont cherché à révéler et dénoncer les crimes persistants des FDLR ont été tuées, torturées ou autrement menacées.
HRW cite le cas d'un directeur d'école et son fils tués le 12 janvier dernier, à Ruhanga, dans le territoire de Masisi, par des combattants des FDLR qui leur reprochaient d'avoir donné des informations à des responsables du gouvernement congolais sur la présence de ces rebelles rwandais.
Les corps des deux victimes ont été découverts plus tard décapités, leurs têtes plantées sur des bâtons, selon HRW.
Les FDLR sont un groupe armé composé de Rwandais d'ethnie hutue et basé dans l'est de la RDC, dont certains dirigeants sont accusés d'avoir participé au génocide des Tutsis de 1994 dans leur pays d'origine.
Des experts de l'ONU estiment que ce groupe armé compte environ 1 400 combattants actifs en 2015, alors que ce chiffre était estimé à 6 000 en 2008.
Les relations entre Kinshasa et les rebelles rwandais ont connu des fluctuations au cours des 20 dernières années.
Le Groupe d'experts de l'ONU sur la République démocratique du Congo a fait état d'une étroite collaboration à certains moments entre des officiers de l'armée congolaise et leurs homologues des FDLR, laquelle collaboration se serait poursuivie en partie au cours des derniers mois. Certains officiers de l'armée congolaise se sont partagé le butin des commerces lucratifs des minerais et du charbon dans lesquels le groupe armé est impliqué, selon ces experts de l'ONU.
Pour HRW, le gouvernement congolais devrait adresser un message clair à ses responsables militaires et civils que toute collaboration avec les FDLR est strictement interdite, et que les personnes impliquées seront passibles d'actions disciplinaires ou de poursuites judiciaires.
« Le gouvernement congolais et les forces de maintien de la paix de l'ONU devraient faire de l'arrestation de Mudacumura une priorité essentielle », demande Human Rights Watch. Le chef rebelle hutu rwandais se cacherait, selon l'organisation, dans la région reculée à la frontière entre les territoires de Walikale et de Lubero, dans le Nord-Kivu.
En avril 2013, le gouvernement des États-Unis a annoncé une récompense pouvant atteindre 5 millions de dollars pour toute information menant à l'arrestation de Mudacumura.