Battu par les soldats du Mouvement pour la Libération du Congo (MLC), il est un rescapé, comme sa fille, violée à dix ans par les miliciens du mouvement créé par l'accusé.
Le visage et la voix déformés par mesure de protection, le témoin 42 a raconté l'attaque contre sa famille, survenue en novembre 2002. « Vous savez chez nous les africains, il n'est pas facile qu'une fille puisse venir parler de telles choses à son père. Elle préfère beaucoup plus se confier à sa maman (...) C'est sa maman qui est venue me dire que la fille a été complètement détruite. La fille lui a dit qu'elle a été violée par deux banyamulenges (...) C'était une fille de 10 ans, qui était vierge. »
Les soldats de Jean-Pierre Bemba, appelés par le président centrafricain d'alors, Ange Félix Patassé, pour le soutenir contre les rebelles, s'étaient installés au PK12, proche de Bangui.
Comme d'autres, le témoin 42 a aussi été victime de pillages. « Ce sont des gens très organisés en matière de vol, a-t-il dit aux trois juges. Il y avait un groupe à l'intérieur de la maison, qui avait commencé à prendre tout nos biens. Ils m'ont mis face contre le sol. L'un deux tenait son pied contre mon cou. Ils ont cassé l'armoire. Ils ont volé mes livres ». Les banyamulenge faisaient aussi « la chasse aux matelas ». « Ce qui les intéressait le plus, c'était les matelas de mousse. Est-ce que chez eux ils dormaient sur des nattes ? Je ne sais pas. Mais chacun d'eux pouvait prendre sur lui trois, quatre matelas. »
Selon le témoin, grâce à son séjour en Centrafrique, Jean-Pierre Bemba pouvait alimenter sa guerre en République démocratique du Congo (RDC). « Au moment des événements, une ligne aérienne a été créée. Je me suis dit que Bemba avait gagné, et que cela lui offrait la possibilité d'alimenter sa rébellion parce qu'il avait besoin de carburant. La république Centrafricaine était une ouverture ».
En arrivant en Centrafrique, les soldats de Bemba « ont humilié des officiers généraux » de l'armée centrafricaine. « Ils ont été déshabillés, ils ont été salis » a-t-il dit, précisant que le président Patassé n'avait « plus confiance dans son armée ». Le témoin a défendu « les libérateurs », les rebelles du général François Bozizé, au pouvoir depuis mars 2003. « Ils n'ont rien fait de mal à la population, leur objectif était de conquérir le pouvoir » a-t-il dit au substitut du procureur, Hesham Mourad.
La déposition se poursuit avec le contre-interrogatoire de la défense. Le procès de Jean-Pierre Bemba a commencé le 22 novembre 2010 à La Haye, aux Pays-Bas.
SM/GF
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