Rappel des moments-clés dans les relations entre la France et le Rwanda, longtemps tendues mais apaisées depuis la reconnaissance des "responsabilités" françaises dans le génocide des Tutsi en 1994.
La cour d'appel de Paris a confirmé mercredi le non-lieu général prononcé en 2023 dans l'enquête sur l'inaction qui était reprochée à l'armée française lors des massacres de Bisesero (ouest du Rwanda) en juin 1994.
- Génocide -
Au début des années 1990, la France soutient le président Juvénal Habyarimana, un Hutu en butte à la rébellion tutsi du Front patriotique rwandais (FPR) menée par Paul Kagame.
Le 6 avril 1994, l'avion du président Habyarimana est abattu. S'ensuivent des massacres à grande échelle de Tutsi par des extrémistes hutu.
- Opération Turquoise -
Le 22 juin 1994, l'ONU donne son feu vert à la France pour l'opération militaire Turquoise, à but humanitaire. Le FPR accuse Paris de chercher à sauver les autorités et les auteurs du génocide.
Turquoise mobilise, jusqu'à août, 2.500 soldats français et crée une "zone humanitaire sûre" (ZHS) dans le sud-ouest du Rwanda, freinant de facto la progression du FPR. En juillet, celui-ci s'empare de Kigali, mettant fin au génocide qui a fait plus de 800.000 morts selon l'ONU, essentiellement au sein de la minorité tutsi.
- "Erreur de stratégie" -
Fin 1998, une mission parlementaire française conclut que la France n'a été "nullement impliquée" dans le génocide mais a commis "une erreur globale de stratégie" dans le pays.
Kigali accuse Paris d'être "coupable de crimes de génocide au Rwanda".
- Relations rompues -
En novembre 2006, le juge français Jean-Louis Bruguière recommande des poursuites devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) contre le président Kagame pour sa "participation présumée" à l'attentat déclencheur du génocide. Il émet des mandats d'arrêt contre neuf de ses proches.
Kigali rompt ses relations diplomatiques avec Paris. En 2008, une commission d'enquête rwandaise accuse Paris d'avoir "participé" à l'exécution du génocide.
Les relations sont rétablies en 2009, réconciliation cimentée l'année suivante par une visite à Kigali de Nicolas Sarkozy, alors président, qui reconnaît de "graves erreurs d'appréciation" et "une forme d'aveuglement" de la France lors du génocide.
- Rapports -
En 2010, un rapport rwandais sur l'attentat contre le président Habyarimana désigne comme responsable une frange extrémiste des Forces armées rwandaises.
Un rapport d'expertise français conclut en 2012 que l'avion a été abattu par des missiles tirés depuis un camp tenu par des Hutu loyalistes. Pour Kigali, le rapport "rend justice" à sa position.
- "Esprit nouveau" -
Les relations s'améliorent fin 2018, Paris soutenant la nomination de la Rwandaise Louise Mushikiwabo à la tête de la Francophonie.
En 2020, Paul Kagame salue un "esprit nouveau".
La cour d'appel de Paris confirme la même année l'abandon des poursuites contre les proches de M. Kagame. Le dossier est clos par la justice française en 2022.
- "Important pas en avant" -
Le 26 mars 2021, un rapport d'historiens remis au président français Emmanuel Macron estime que la France porte des responsabilités "accablantes" dans le génocide, tout en écartant la notion de "complicité".
Le 7 avril, Paul Kagame salue un "important pas en avant".
Le 19 avril, un autre rapport, commandé par Kigali au cabinet d'avocats américain Levy Firestone Muse, conclut que Paris "porte une lourde responsabilité" dans le génocide "prévisible".
- Paris reconnaît ses "responsabilités" -
Le 27 mai 2021, Emmanuel Macron reconnaît à Kigali les "responsabilités" de la France dans le génocide. Sans présenter d'excuses, il dit espérer le pardon des victimes et annonce la nomination d'un ambassadeur français au Rwanda.
Paul Kagame salue les paroles de son homologue, qui "avaient plus de valeur que des excuses".
Pour le 30e anniversaire du déclenchement des massacres, le 7 avril 2024, Emmanuel Macron s'en tient à ses déclarations de 2021.