Ethiopie: les violations s'amplifient dans les zones de conflit (Commission droits humains)

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Les violations des droits humains, de la part des forces gouvernementales ou de groupes armés, "s'amplifient" dans les nombreuses zones en conflit d'Ethiopie, déplore vendredi dans son rapport annuel la Commission éthiopienne des droits humains (EHRC), institution publique.

Plusieurs conflits armés, aux dynamiques diverses et sans liens entre eux, déchirent l'Ethiopie, deuxième pays le plus peuplé d'Afrique avec environ 120 millions d'habitants.

En novembre 2022, un accord de paix a mis fin à une guerre meurtrière, marquée par de nombreuses exactions, entre le gouvernement fédéral, appuyé par des forces régionales, et les autorités de l'Etat régional du Tigré, entrées en rébellion.

Mais des conflits de plus ou moins forte intensité continuent ou sont nés depuis, notamment dans les deux Etats régionaux les plus peuplés d'Ethiopie, l'Oromia - où les forces fédérales affrontent depuis 2018 l'Armée de libération oromo (OLA) - et l'Amhara, où elles sont aux prises depuis un an avec l'insurrection de milices populaires "Fano".

Durant l'année écoulée, "des conflits armés, attaques et affrontements ont été recensés dans la plupart des régions d'Ethiopie", constate dans son rapport l'EHRC, institution statutairement indépendante.

"La préoccupation la plus urgente demeure la souffrance des civils (...) du fait des forces gouvernementales ou des groupes armés", explique l'EHRC.

Elle dénonce aussi la poursuite d'"exécutions de civils", même hors du cadre d'un conflit, l'augmentation des enlèvements et les nombreuses arrestations arbitraires - notamment de journalistes - sous le régime de l'état d'urgence imposé entre août et juin derniers en Amhara.

L'EHRC constate néanmoins des progrès dans les conditions de détention et le traitement des détenus, tout en soulignant avoir constaté "dans quasiment toutes les régions" du pays des détentions "arbitraires" ou sans décision judiciaire, parfois dans des prisons non-officielles.

L'institution se félicite de l'adoption en avril par le gouvernement d'un programme de "justice transitionnelle", devant solder les griefs, violences et abus du passé pour réconcilier une Ethiopie profondément divisée. Ce "processus" est une "avancée-clé", mais devra être "axé sur les victimes, crédible et transparent et conforme aux normes internationales", avertit-elle.

Nommé en 2019 à la tête d'une ERHC alors accusée de complaisance avec le pouvoir et largement décrédibiliée, Daniel Bekele, qui achève fin juillet son mandat de cinq ans, s'est félicité vendredi d'avoir réussi à en faire "une institution nationale indépendante".

Durant "mes cinq ans de mandat", l'Ethiopie "a été au milieu de guerres et de conflits. Donc malheureusement, les cinq dernières années ont été une période de grave crise pour les droits humains en Ethiopie, certains pouvant constituer des crimes de guerre et contre l'humanité", a-t-il déclaré lors d'un entretien à l'AFP.

Mais "le projet de construire une institution nationale indépendante de protection des droits de humains a réussi", s'est-il réjoui, "même si la situation des droits humains en Ethiopie reste très préoccupante et un chantier toujours inachevé".