Soudan: prolongation de la mission d'enquête du Conseil des droits de l'homme de l'ONU

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Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a voté mercredi pour une prolongation de ses investigations sur de présumées violations des droits lors de la guerre qui fait rage au Soudan, malgré les objections des autorités de Khartoum.

Vingt-trois membres du Conseil, qui en compte 47, se sont prononcés en faveur d'une prolongation d'un année supplémentaire de la mission indépendante et internationale d'enquête. Il y a eu 12 votes contre et 12 abstentions.

Cette mission avait été mise en place en octobre 2023 par le Conseil des droits de l'homme pour enquêter sur les violations présumées des droits et du droit humanitaire international.

Le Soudan est le théâtre depuis avril 2023 d'une guerre entre les Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo et l'armée menée par le général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du pays.

Les deux camps ont été accusés de crimes de guerre, notamment d'avoir visé des civils et bloqué de l'aide humanitaire.

La Grande-Bretagne et d'autres pays avaient présenté un projet de résolution visant à renouveler le mandat de la mission d'enquête, au grand dam de Khartoum.

"Ce projet de résolution est injuste et pas équitable", a assuré avant le vote l'ambassadeur du Soudan Hassan Hamid Hassan. "C'est une approche erronée et le Soudan rejette totalement le contenu de cette résolution", a-t-il insisté.

Selon lui, la résolution "assimile une armée nationale remplissant son rôle à une milice rebelle". "Aucun gouvernement n'accepterait ou ne tolérerait de telles rébellions", a-t-il assuré.

Mais pour l'ambassadeur britannique Simon Manley, la mission d'enquête a déjà documenté des "souffrances épouvantables" endurées par les civils lors de cette "guerre brutale et insensée".

- "Documenter ces atrocités" -

"Nous avons besoin d'une surveillance indépendante, nous devons documenter ces atrocités", a-t-il ajouté. "Les autorités soudanaises ne sont peut-être pas favorables à cette résolution mais le peuple soudanais l'est", a-t-il lancé.

"Le Soudan est devenu la crise humanitaire la plus grave au monde", a de son côté déclaré l'ambassadrice américaine Michele Taylor.

Selon elle, "les deux parties au conflit (...) ont commis des crimes de guerre mais les FSR et leurs milices alliées ont commis des crimes contre l'humanité et des actes de nettoyage ethnique".

Au nom des pays de l'Union européenne siégeant au Conseil, le représentant belge Christophe Payot a mis l'accent sur l'impunité, une des caractéristiques de ce conflit.

"Il ne sera possible d'envisager un avenir différent et une paix durable pour le peuple soudanais que si cette tendance est inversée", a-t-il souligné.

Pour l'ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, la prolongation de la mission est "cruciale". "Notre ambition commune doit être de remettre ce conflit en haut de l'agenda international", a-t-il déclaré.

L'Argentine, le Brésil, la France, l'Allemagne, le Japon, l'Afrique du Sud et les Etats-Unis comptent parmi les pays ayant approuvé le texte, contrairement à la Chine, Cuba, l'Erythrée, l'Indonésie, le Maroc, le Qatar et le Soudan.

L'Algérie, le Bangladesh, l'Inde et la Malaisie se sont abstenus.

Composée de trois membres, la mission d'enquête est présidée par Mohamed Chande Othman, ancien président de la Cour suprême de Tanzanie.

Il travaille aux côtés de Joy Ezeilo, doyenne émérite de la faculté de droit de l'université du Nigeria et de Mona Rishmawi, originaire de Jordanie et de Suisse, ancienne experte indépendante de l'ONU sur les droits de l'homme en Somalie.

En raison de la guerre au Soudan, quelque 26 millions de personnes font face à une insécurité alimentaire sévère, et la famine a été déclarée dans le camp de Zamzam au Darfour.

La guerre a fait des dizaines de milliers de morts et plus de dix millions de personnes ont aussi été déplacées par les combats ou contraintes de trouver refuge à l'étranger - soit un Soudanais sur cinq.