"Le génocide commis à Gaza depuis un an est la honte de toute l'humanité", a dénoncé jeudi le président turc Recep Tayyip Erdogan en visite en Albanie, appelant la communauté internationale à faire pression pour un cessez-le-feu.
"Nous devons faire de notre mieux pour garantir de toute urgence un cessez-le-feu permanent et exercer la pression nécessaire sur Israël", a dit M. Erdogan lors d'une conférence de presse avec le Premier ministre albanais Edi Rama.
L'attaque menée par le Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 a entraîné la mort de 1.206 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de chiffres officiels israéliens et incluant les otages morts ou tués en captivité dans la bande de Gaza.
S'en est suivi une guerre dévastatrice menée par Israël contre la bande de Gaza qui a fait à ce jour près de 42.000 morts, réduit à l'état de ruines des secteurs entiers du petit territoire assiégé et déplacé la quasi-totalité de ses 2,4 millions d'habitants.
Le président turc dénonce depuis des mois avec virulence la conduite d'Israël dans la guerre, qualifiant le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu de "boucher de Gaza".
"L'agression conduite par le gouvernement Netanyahu menace désormais l'ordre mondial au-delà de la région", a-t-il encore dit jeudi à Tirana.
En Albanie, pays majoritairement musulman, où un quart de la population est chrétienne et où les mariages mixtes sont fréquents, M. Erdogan a inauguré la grande mosquée de Tirana, financée par son pays, accompagné du Premier ministre Edi Rama. Ce projet a eu un coût de 30 millions d'euros.
La Turquie "fait partie des cinq plus grands investisseurs étrangers" en Albanie, avec 3,5 milliards de dollars d'investissement, avait rappelé M. Erdogan en recevant le Premier ministre Edi Rama à Ankara en février.
Et plus de 600 entreprises turques fournissent des emplois à plus de 15.000 Albanais, avait-il ajouté.
La coopération est aussi militaire entre ces deux membres de l'Otan : Tirana a reçu cette année les premiers drones Bayraktar TB2 turcs, ce dont s'est félicité Edi Rama.
- Success story turque -
M. Erdogan s'est rendu ensuite en Serbie, pays dans lequel la Turquie a fait un grand retour en 2017.
Il a été accueilli jeudi soir à l'aéroport de Belgrade par le président serbe Aleksandar Vucic.
Cinq siècles de présence ottomane en Serbie et une proximité culturelle et historique entre la Turquie et le Kosovo avaient malmené les relations entre les deux pays, mais "cette visite a réparé la relation avec la Serbie", analyse Vuk Vuksanovic, analyste au Centre pour la sécurité politique de Belgrade (BCSP/BCBP).
Depuis, "les Balkans sont une vraie success story pour la diplomatie turque", ajoute-t-il.
Les relations ont parfois connu un refroidissement, comme lorsque Ankara a vendu des drones au Kosovo. Mais l'affront pourrait être lavé avec un nouvel accord de coopération, estime M. Vuksanovic.
"Je ne serais pas surpris si un accord militaire était conclu", ajoute ce chercheur en sciences politiques, qui envisage trois principaux axes à cette visite : "la coopération militaire, la position des entreprises turques et la volonté de Belgrade de persuader Ankara de réduire son soutien au Kosovo".
La Serbie et ses 6,6 millions d'habitants sont devenus un terrain économique important pour Ankara.
La valeur totale des investissements turcs y est passée "de 1 à 400 millions de dollars (environ 365 millions d'euros) au cours des dix dernières années", selon le président du Conseil d'affaires Turquie-Serbie, cité en juin par l'agence de presse turque Anadolu.
Selon les chiffres du gouvernement serbe, les exportations turques en Serbie ont presque doublé et atteint 2,131 milliards de dollars en 2022, contre 1,149 milliard de dollars en 2020 (1,95 milliard d'euros contre 1,05 milliard d'euros).
Belgrade est aussi une grande destination de voyage pour les Turcs, qui y étaient en 2022 le deuxième contingent de touristes, juste derrière les Bosniens et devant les Russes.