Kithure Kindiki: l'universitaire à la voix douce devenu poids lourd politique au Kenya

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Kithure Kindiki, un ancien universitaire devenu riche avocat puis ministre, a été propulsé sur le devant de la scène internationale lorsqu'il a défendu avec succès l'actuel président William Ruto à la Cour pénale internationale (CPI).

Au lendemain de la destitution historique du vice-président Rigathi Gachagua, l'actuel ministre de l'Intérieur, 52 ans, a été désigné vendredi par le président William Ruto pour le replacer.

Multimillionnaire, cet ex-professeur d'université à la voix douce originaire de la région stratégique Mont Kenya est loué par ses partisans pour son bon sens.

Mais il a aussi été vivement critiqué pour avoir défendu les forces de l'ordre lors de manifestations antigouvernementales en juin-juillet, dont la violente répression policière a fait au moins 60 morts.

M. Kindiki a également dû justifier au parlement une fortune estimée à 5,4 millions de dollars (près de cinq millions d'euros), qu'il dit issue en grande partie des revenus de son cabinet d'avocats et d'autres petites entreprises.

En 2011, il est propulsé sur le devant de la scène internationale lorsque M. Ruto, alors député de l'opposition, le choisit pour faire partie de son équipe légale pour le défendre à la CPI.

L'actuel président kényan y faisait alors face à trois chefs d'accusation de crimes contre l'humanité - meurtre, expulsion forcée et persécution - pour son rôle présumé dans les violences post-électorales au Kenya en 2007-2008, les pires depuis l'indépendance (plus de 1.100 morts et 600.000 déplacés).

L'affaire, qui a démarré en 2011, a été suivie de près au Kenya, d'autant que plusieurs autres dirigeants kényans ont été inculpés, dont Uhuru Kenyatta, élu président en 2013 avec l'aide de M. Ruto.

La CPI finira par abandonner les poursuites après ce qu'elle a dénoncé comme une campagne d'intimidation de témoins.

- Purge -

Abraham Kithure Kindiki naît en 1972 dans le village d'Irunduni, au centre du Kenya. Fils d'un évangéliste, il est l'un des neufs enfants d'une fratrie d'intellectuels.

Il étudie le droit à l'Université Moi du Kenya avant d'obtenir sa maîtrise et un doctorat à l'Université de Pretoria en Afrique du Sud.

Après avoir enseigné dans plusieurs universités kényanes, il devient vice-adjoint à l'Université de Nairobi, la première du pays.

A la suite des violences électorales fin 2007-début 2008, l'académique rejoint le gouvernement en tant que secrétaire à la cohésion nationale au ministère de la Justice.

Un poste qu'il n'occupera que 100 jours, avant de retourner donner enseigner.

En 2013, il est élu sénateur de son comté d'origine, Tharaka Nithi, et réélu en 2017.

A l'approche des élections 2022, M. Kindiki est une victime collatérale de la rupture entre l'ex-président Kenyatta et son vice-président de l'époque William Ruto.

Il est démis de ses fonctions de vice-président du Sénat lors d'une purge brutale des alliés de M. Ruto par le parti Jubilee de Kenyatta, alors majoritaire au Parlement.

Cet homme à la voix douce est critiqué pour son manque de charisme face aux foules, un reproche également adressé à Rigathi Gachagua, qui était peu connu du grand public avant de devenir l'adjoint du chef de l'Etat.

En 2022, beaucoup s'attendaient à ce que M. Ruto choisisse M. Kindiki comme colistier, mais M. Gachagua a été choisi après 17 heures de réunion au sein de la coalition au pouvoir.

M. Kindiki, qui avait renoncé à sa réélection au Sénat dans l'espoir de devenir vice-président, se console néanmoins avec le poste prestigieux de ministre de l'Intérieur.

Il a été vivement critiqué pour avoir défendu les forces de l'ordre lors des manifestations antigouvernementales en juin-juillet, en grande partie menées par des jeunes, alors que la violente répression policière y a fait au moins 60 morts.

A la suite de ce mouvement, il a été limogé par M. Ruto, comme la quasi-totalité du gouvernement, avant d'être reconduit au sein d'un exécutif remanié.