Cameroun: un leader séparatiste reste en détention en Norvège pour incitation à des crimes contre l'humanité au Cameroun

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Un tribunal d'Oslo a décidé mardi de prolonger la détention d'un leader séparatiste camerounais arrêté fin septembre en Norvège pour avoir incité à commettre des crimes contre l'humanité au Cameroun, selon un document transmis par l'avocat de parties civiles à l'AFP.

"Cho Lucas Yabah restera en détention jusqu'au 14 janvier 2025", peut-on lire dans une copie du compte-rendu d'audience traduite par Emmanuel Nsahlaï, avocat d'un groupe de victimes du conflit qui oppose depuis 2016 l'armée camerounaise et des groupes armées dans l'ouest du Cameroun.

Selon ce document, Cho Lucas Yabah, aussi appelé Lucas Cho Ayaba, est accusé d'avoir été "président du gouvernement de l'Ambazonie et commandant de l'Ambazonian Defense Force", un des groupes séparatistes armés qui se livrent fréquemment à des enlèvements de civils, y compris des fonctionnaires.

L'accusé "a nié que ses activités aient visé intentionnellement des civils" et qu'elles constituent une incitation à la commission de crimes contre l'humanité telle que définie par la loi norvégienne, a observé le juge.

La cour a également jugé qu'une interdiction de visite et de communication ne constituait pas une mesure disproportionnée, compte tenu des risques "d'altération des preuves" et de "la difficulté d'obtenir des témoignages en raison de la peur", alors que de nombreux témoins doivent être interrogés dans plusieurs pays.

L'unité de police norvégienne Kripos, chargée d'enquêter sur les crimes de guerre et crimes contre l'humanité, avait annoncé fin septembre l'arrestation d'un homme au "rôle central dans un conflit armé en cours au Cameroun".

C'est la première fois que la Norvège arrête quelqu'un sur des soupçons d'incitation à commettre des crimes contre l'humanité, un chef d'accusation passible de 30 ans de prison.

Le conflit a éclaté fin 2016 après que le président camerounais Paul Biya a fait réprimer violemment des manifestations pacifiques d'anglophones, qui représentent environ 20% de la population et s'estiment ostracisés et marginalisés par le pouvoir central francophone.

Les civils sont pris en tenaille et victimes d'exactions commises par les deux camps, selon des ONG internationales et l'ONU. Le conflit a fait plus de 6.000 morts et forcé plus d"un million de personnes à fuir leur domicile, selon International Crisis Group (ICG).

L'avocat Emmanuel Nsahlaï avait déposé plainte aux Etats-Unis, où il exerce, contre M. Cho Ayaba et l'État norvégien.

Il avait également demandé une enquête au procureur de la Cour pénale internationale (CPI) en février 2024 et en avait informé l'ambassade de Norvège à Washington, qui avait assuré être "déterminée à lutter contre l'impunité des auteurs des crimes les plus graves qui affectent la communauté internationale dans son ensemble" et qu'elle coopérait "étroitement avec la CPI", selon un courrier transmis par l'avocat et consulté par l'AFP.