Apologie du terrorisme, suite à donner à une possible motion de censure, contours de l'abolition de la réforme des retraites: les sujets de discorde entre socialistes et Insoumis, les meilleurs ennemis du Nouveau Front populaire, se multiplient alors qu'un après-Barnier s'esquisse dans les esprits.
La menace de la motion de censure du gouvernement semblant se préciser, la question revient une nouvelle fois: qui pourrait avoir la majorité suffisante pour être nommé - et éviter une censure - à Matignon?
Et alors que toute la gauche était réunie derrière sa candidate pour la primature cet été, Lucie Castets, cette dernière n'a plus les faveurs des socialistes.
Au lieu de soutenir la haute fonctionnaire, le chef des députés socialistes Boris Vallaud a plaidé dimanche pour un dialogue entre tous les partis pour "poser la question des conditions d'une non-censure".
Ce qui impliquerait nécessairement des compromis. Et même des compromissions, fulmine LFI, Jean-Luc Mélenchon ayant rapidement accusé les socialistes d'être "à la recherche d'une union nationale, pour transformer le NFP en +nouveau socle commun+".
La proposition du député des Landes est-elle une porte ouverte à un gouvernement technique ou encore un gouvernement de centre-gauche?
"Les socialistes espèrent occuper l'espace central. Mais c'est un immense vide dans lequel ils vont tomber", tacle un cadre insoumis, selon lequel Boris Vallaud en profite pour "se positionner" en vue du prochain congrès socialiste. Et éventuellement pour Matignon même.
"La question du casting à Matignon n'a aucun sens tant qu'on ne réussit pas à faire fonctionner l'Assemblée", plaide pour sa part un proche du patron des députés socialistes.
La proposition de Boris Vallaud pourrait-elle convaincre d'autres formations de gauche?
Récemment, un cadre écologiste plaidait pour un mode de réflexion assez similaire. "Aujourd'hui c'est le +pourquoi faire+ qui doit être déterminant. Je ne serai pas pour retomber tout de suite sur le +qui?+".
- Un PS "tétanisé" -
Dans un contexte où LFI a déjà vertement reproché au PS la position du chancelier social-démocrate allemand Olaf Scholz sur sa volonté de ne pas appliquer le mandat d'arrêt de la CPI visant Benjamin Netanyahu, les discussions stratégiques sont polluées par la polémique suscitée par la proposition des Insoumis d'abroger le délit d'apologie du terrorisme du code pénal, pour revenir à la loi de 1881 sur la liberté de la presse.
"La définition" de la loi de 2014 "demande seulement à être précisée pour en éviter les dérives", a plaidé le patron des socialistes Olivier Faure dans un long message au ton quelque peu excédé visant à répondre aux nombreuses accusations insoumises.
"Il y a forcément une volonté d'embêter les socialistes et Cazeneuve" - le texte ayant été défendu par Bernard Cazeneuve en 2014 - décrypte un élu insoumis selon qui la direction du mouvement de gauche radicale "ne s'attendait pas à un tel tollé".
"À quelques jours de la niche parlementaire, c'est dommage que ce sujet prenne le pas plutôt que de faire monter la sauce sur les retraites", ajoute ce député insoumis.
Jeudi, pour cette journée parlementaire réservée à ses textes, LFI déploiera en effet son texte phare: l'abolition de la réforme des retraites d'Emmanuel Macron.
Les Insoumis y ont inclus la suppression de la réforme de la ministre PS Marisol Touraine, votée sous le mandat de François Hollande, qui allongeait la durée de cotisation à 43 annuités.
"Quand le NFP décide collectivement d'une démarche, LFI ne peut pas s'empêcher de nous doubler ou d'aller plus loin. Ils ont ajouté la suppression de la loi Touraine pour embêter le PS", soupire une élue écologiste.
Pas suffisant cependant en faire un casus belli pour les socialistes.
Boris Vallaud, qui a travaillé comme secrétaire général adjoint de l'Élysée sous Hollande, a indiqué qu'il était prêt à sacrifier la réforme Touraine pour arriver à la suppression de la réforme des retraites.
Est-ce que tout cela sera suffisant pour rompre l'alliance de gauche, d'autant plus que les Insoumis veulent prendre certaines villes au PS aux prochaines municipales? Pas sûr, estime un ministre.
"Le PS est tétanisé par une possible dissolution de l'Assemblée sans accord électoral dont il pourrait être victime au premier tour", analyse-t-il.