Ancien commandant des opérations de maintien de la paix en Sierra Léone et au Libéria, le lieutenant-général Opande a affirmé que les hommes du Mouvement pour la libération du Congo (MLC) « pouvaient communiquer avec Gbadolite », QG de Jean-Pierre Bemba au Congo-Kinshasa.
S'appuyant sur le dossier du procureur, le témoin a expliqué que « sur le terrain, un commandant de brigade faisait de son mieux pour travailler avec la force centrafricaine. Mais c'est une coordination qui n'a pas réussi et en conséquence, la brigade se retrouvait seule », a-t-il affirmé. « Elle recevait des informations de Gbadolite et elle transmettait ces informations à la formation inférieure ».
Pour la défense du sénateur congolais, Jean-Pierre Bemba, les hommes du MLC sont venus renforcer les troupes centrafricaines, à la demande du président d'alors, Ange-Félix Patassé, en proie à une rébellion. L'accusé, affirment-ils, n'avait dès lors plus de pouvoir de commandement sur ses troupes.
« Si le chef d'Etat-major de l'armée américaine, ou le Premier ministre britannique, ou, que dis-je, le président français, commandant en chef des armées, va rendre visite aux troupes de son pays, en opération en Afghanistan ou en Irak, est-ce que cela fait d'eux le commandant des opérations qui se déroulent sur le terrain ? » a demandé maître Aimé Kilolo, avocat de Jean-Pierre Bemba.
« Le commandant en chef politique est différent du commandant militaire, qui se trouve sur le terrain. Les personnes dont vous parlez représentent un vaste éventail de structures de commandement ou d'officiers. Mais si vous avez les moyens de surveiller, ajoute le témoin, la distance importe peu. Il existe des commandants qui sont à des milliers de kilomètres de leurs troupes mais qui ont toujours le contrôle sur celles-ci ».
Interrogé sur d'éventuelles consignes données par Jean-Pierre Bemba à ses officiers sur le terrain, dont le chef des opérations, le commandant Mustafa, le témoin n'a pas été en mesure de répondre.
« A votre connaissance, est-ce que le président Patassé donnait des ordres au commandant Mustafa ? » a encore interrogé maître Kilolo. « D'après les documents que j'ai, les déclarations que j'ai, je ne sais pas du tout. Je ne voudrais pas me livrer à des devinettes » a simplement rétorqué Daniel Opande.
L'avocat a ensuite tenté de démontrer que l'expertise du témoin était incomplète, ce dernier n'ayant pas eu accès à la totalité du dossier du procureur. Il a établi que l'officier kényan n'avait pas été en mesure d'interroger les officiers du MLC et leurs homologues centrafricains sur le terrain.
Poursuivi pour crimes contre l'humanité commis en Centrafrique, en 2002 et 2003, Jean-Pierre Bemba est en procès depuis novembre 2010. Le procureur devrait boucler la présentation de ses témoins dans les premières semaines de l'année 2012.
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