Le procès pour crimes de guerre d'un chef de milice soudanais, accusé de viols, meurtres et torture dans la région du Darfour lors de la guerre civile qui a ravagé le Soudan, entre cette semaine dans sa dernière ligne droite.
La Cour pénale internationale (CPI), qui siège à La Haye, entendra les plaidoiries finales pendant trois jours à partir de mercredi dans l'affaire Ali Mohamed Ali Abd-Al-Rahman, connu sous le nom de guerre d'Ali Kosheib.
Chef de la milice soudanaise Janjawid et allié du dirigeant déchu Omar el-Béchir, Ali Kosheib doit répondre de 31 chefs d'accusation pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité.
Les procureurs l'ont accusé d'être un "auteur actif" de meurtres lors de la guerre du Darfour en 2003-2004.
Décrit comme le "colonel des colonels", Ali Kosheib est soupçonné d'être responsable de violentes attaques contre des villages de la région de Wadi Salih au Darfour-Central en août 2003.
"Des civils ont été attaqués, violés et assassinés, leurs maisons et leurs villages ont été détruits, des milliers de personnes ont été déplacées de force", avait déclaré Fatou Bensouda, ancienne procureure de la CPI, lors du procès.
"Des hommes ont été embarqués dans des véhicules, emmenés non loin de là et exécutés de sang froid. Ali Kosheib a assisté et participé directement à ces crimes odieux", avait-elle affirmé.
L'actuel procureur général de la CPI, Karim Khan, a déclaré qu'Ali Kosheib et ses forces "se sont déchaînés dans différentes parties du Darfour".
L'accusé, né en 1949, nie en bloc.
- "Des progrès significatifs" -
Les combats ont éclaté au Darfour lorsque des rebelles, dénonçant une discrimination ethnique systématique, ont pris les armes contre le régime de M. Béchir, dominé par les Arabes.
Khartoum a réagi en déployant les Janjawids, force composée de membres des groupes nomades de la région.
Selon l'ONU, le conflit au Darfour a fait 300.000 morts et 2,5 millions de déplacés.
Omar el-Béchir, qui a dirigé le Soudan d'une main de fer pendant trois décennies, a été destitué en avril 2019 après des mois de manifestations et est recherché depuis 2005 par la CPI pour génocide.
Ali Kosheib s'est pour sa part réfugié en République centrafricaine en février 2020, lorsque le nouveau gouvernement soudanais a annoncé son intention de coopérer avec la CPI.
Quatre mois plus tard, il s'est rendu volontairement. Son procès est le premier à découler d'une saisine par le Conseil de sécurité de l'ONU.
M. Khan espère également délivrer des mandats relatifs à la situation actuelle au Soudan.
Depuis avril 2023, le Soudan est en proie à une guerre entre l'armée, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane, et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) de son ex-adjoint devenu rival, le général Mohamed Hamdane Daglo.
Le conflit a fait des dizaines de milliers de morts et plus de onze millions de déplacés, et alimente l'une des pires crises humanitaires récentes selon l'ONU.
Les deux parties ont été accusées de cibler des civils et de bombarder délibérément des zones résidentielles.
Lundi, une frappe aérienne de l'armée soudanaise sur un marché du Darfour-Nord a tué plus de 100 personnes, selon un groupe d'avocats pro-démocratie. L'armée a rejeté ces accusations, les qualifiant de "mensonges" propagés par des partis politiques soutenant les FSR.
L'année dernière, la CPI a ouvert une nouvelle enquête sur les crimes de guerre commis dans la région, et M. Khan a évoqué des "progrès significatifs".
"J'espère que d'ici mon prochain rapport, je serai en mesure d'annoncer des demandes de mandats d'arrêt à l'encontre de certains des individus les plus responsables", a-t-il déclaré.