Existe-t-il suffisamment d'éléments nouveaux pour retirer l'asile à Innocent Musabyimana, un Rwandais poursuivi pour sa possible participation au génocide au Rwanda en 1994 ? La Cour nationale du droit d'asile (CNDA), saisi mercredi, rendra sa décision le 8 janvier.
Innocent Musabyimana, 52 ans, entré en France en 2007, avait fait l'objet de poursuites au Rwanda, en 2012, accusé d'avoir participé au génocide qui a fait au moins 800.000 morts, selon l'ONU.
Kigali avait alors réclamé son extradition, une demande rejetée en 2014 par la Cour de cassation française.
Mais en 2019, les investigations sont relancées, cette fois en France, et le Rwandais est mis en examen en 2022 à Paris et placé sous contrôle judiciaire.
En raison de cette mise en examen, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) lui retire cette protection en janvier 2024. Une décision dont il a fait appel et examinée mercredi par la CNDA.
La rapporteure publique n'a pas tranché et a invité la cour à s'interroger sur les éléments apportés au dossier par l'Ofpra pour justifier son exclusion à une mesure de protection.
L'administration chargée d'octroyer l'asile a ainsi relevé que le père de M. Musabyimana avait été membre de la Coalition pour la défense de la République (CDR), un parti extrémiste hutu et qu'il avait lui-même été "très évasif" sur ses activités pendant le génocide.
L'Ofpra a également pointé "l'absence de réponses claires" sur le fait qu'il se serait "tenu à distance" de l'idéologie de son père et a souligné que des témoignages l'accusent d'avoir notamment participé à la traque de Tutsis et commis des viols de femmes tutsies.
"Le seul élément nouveau est sa mise en examen. Tout ces éléments étaient connus de l'Ofpra lorsqu'il lui avait donné l'asile", a défendu de son côté Me Philippe Meilhac, l'avocat de M. Musabyimana, absent mercredi à l'audience.
"Or, la particularité de ces dossiers (rwandais instruits en France) est qu'ils aboutissent à de nombreux non-lieux", a ajouté l'avocat, relevant que plus de 30 ans s'étaient écoulés depuis le génocide.
Fin novembre le tribunal administratif de Dijon avait rejeté l'arrêté d'expulsion visant M. Musabyimana.