Soudan du Sud: couvre-feu après des pillages de commerces soudanais à Juba

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Le Soudan du Sud a instauré vendredi un couvre-feu nocturne après qu'une manifestation a dégénéré en pillages de commerces appartenant à des Soudanais la veille au soir à Juba, capitale d'un jeune pays frappé par une instabilité chronique.

Un rassemblement avait été organisé jeudi à Juba pour protester contre des informations faisant état du meurtre récent de 29 citoyens sud-soudanais à Wad Madani, dans l'État d'Al-Jazira au Soudan voisin en proie à la guerre.

La manifestation a dégénéré en pillages de commerces appartenant à des Soudanais et la police a tiré jeudi soir des coups de feu pour disperser les manifestants. L'AFP n'a pas connaissance de victimes.

Lors d'un briefing à la presse depuis le quartier général de l'armée à Bilpam, le porte-parole militaire Lul Ruai a indiqué que plus de 600 ressortissants soudanais avaient été amenés sur les lieux afin de les protéger de la foule en colère.

Ils étaient des centaines assis à même le sol, a observé un journaliste de l'AFP.

"Nous avons ordonné un couvre-feu à partir de 18H00" (17H00 GMT), a déclaré l'inspecteur général de la police Abraham Manyuat à la télévision publique, la South Sudan Broadcasting Corporation, qui a précisé que la mesure visait à prévenir toute violation de "propriétés publiques ou privées".

Vendredi matin, le calme semblait revenu à Juba, malgré des tirs sporadiques. La plupart des commerces sont restés fermés et l'armée et la police étaient déployées aux principales intersections.

Une nouvelle manifestation a débuté plus tard dans la matinée à Juba, de même que dans les villes de Bor, Aweil et Wau.

Le président a en fin d'après-midi appelé "à la retenue" et à "s'abstenir de représailles". "Il est de notre devoir d'offrir protection et soutien aux réfugiés soudanais qui ont fui la guerre au Soudan", a déclaré Salva Kiir dans un communiqué.

Il a indiqué avoir demandé au Soudan une enquête, et que les responsables rendent des comptes.

Il a également sommé les forces de sécurité de "veiller à ce que personne ne se fasse justice lui-même" et d'"assurer la protection de tous les citoyens soudanais sur le territoire".

"J'ordonne en outre à toutes les forces organisées qui ne sont pas en service de se présenter à leurs unités et à leurs casernes pour obtenir de nouvelles directives", a-t-il ajouté.

- Instabilité chronique -

De nombreux citoyens soudanais résident ou se sont réfugiés au Soudan du Sud, qui a obtenu l'indépendance de son voisin en 2011 mais qui est depuis frappé par l'instabilité chronique, les luttes de pouvoir, la corruption et les conflits ethniques locaux.

Deux ans après son indépendance, le Soudan du Sud a plongé en 2013 dans une guerre civile meurtrière opposant les rivaux Salva Kiir et Riek Machar, faisant plus de 400.000 morts et des millions de déplacés.

En novembre, des tirs nourris avaient été échangés à Juba à la résidence de l'ancien puissant chef des services de renseignement Akol Koor, tout juste limogé.

Le Soudan est de son côté en proie à une guerre, depuis avril 2023, opposant l'armée dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) menés par son ancien allié, le général Mohamed Hamdane Daglo.

Le conflit a tué des dizaines de milliers de personnes, déplacé 12 millions de personnes, et des centaines de milliers de personnes sont victimes de la famine.

L'armée soudanaise a réussi à avancer cette semaine sur Al-Jazira, reprenant la capitale de l'État, Wad Madani, aux FSR qui la contrôlaient depuis plus d'un an.

Vendredi, le Haut commissaire de l'ONU aux droits de l'homme Volker Türk a déclaré que la guerre au Soudan devenait "encore plus dangereuse pour les civils", après la mort de plus d'une douzaine de personnes dans des attaques à caractère ethnique contre des groupes minoritaires dans l'Etat central d'Al-Jazira.

Il existe "des preuves de crimes de guerre et d'autres atrocités", a-t-il ajouté sur le réseau social X.