Le 14 mai 2011, l’ancien chef d’état-major de l’armée, le général Augustin Bizimungu a écopé de 30 ans de prison tandis que son ancien collègue de la gendarmerie, le général Augustin Ndindiliyimana a été condamné à une peine équivalant à la durée de sa détention préventive. Il a ainsi été aussitôt remis en liberté. Dans ce même procès collectif, le major François-Xavier Nzuwonemeye qui commandait le bataillon de reconnaissance et le capitaine Innocent Sagahutu qui était chef d’un escadron de cette unité d’élite ont écopé chacun de 20 ans de réclusion.
Dans une requête déposée le 19 janvier, Ibuka et l’ONG britannique Survivors Fund avaient demandé à la chambre d’appel « d’accepter que les vues des victimes soient considérées lorsqu’elle évaluera les peines grossièrement inadéquates imposées par la chambre de première instance ».
Les deux organisations souhaitaient pouvoir donner leur avis, en tant qu’ami de la cour (amicus curiae) lors de l’audience d’appel dont la date n’a pas encore été fixée. A l’appui de leur demande, elles avaient rappelé que plusieurs juridictions nationales et internationales reconnaissent aux victimes le droit d’être entendues au sujet de la peine.
Conformément au règlement de procédure et de preuve du TPIR, une chambre a le pouvoir discrétionnaire d’accepter l’audition d’un ami de la cour lorsqu’elle estime que cette intervention pourrait être utile dans l’examen de l’affaire en question.
Or, raisonne la chambre d’appel, dans sa décision datée de mercredi et reçue jeudi à l’agence Hirondelle, « la requête ne propose d’aborder aucune question de droit soulevée dans l’appel du procureur au sujet de la peine » .
« Au lieu de cela, la requête avance des arguments concernant la participation des victimes au processus de fixation de la peine, ce qui n’est pas sous examen dans cette affaire », estiment les juges, rejetant ainsi la demande.
Ibuka et Survivors Fund affirmaient dans leur requête que ces peines perpétuent en quelque sorte l’impunité et « ravalent la dignité des victimes et des survivants ».
Les requérants attiraient également l’attention sur un autre procès d’officiers, dans lequel la chambre d’appel a « drastiquement réduit les peines imposées par la chambre de première instance ».
Dans ce procès dit « Militaires I », l’ex-directeur de cabinet au ministère de la Défense, le colonel Théoneste Bagosora qui avait été condamné à la perpétuité, a vu sa peine réduite à 35 ans de réclusion tandis que le lieutenant-colonel Anatole Nsengiyumva qui avait également écopé de la prison à vie, s’en est tiré avec 15 ans d’emprisonnement. Il a été immédiatement libéré car il venait de passer en détention préventive un peu plus de 15 ans.
ER/GF