Ce linguiste, qui a longtemps enseigné à l’Université nationale du Rwanda (UNR), a été extradé du Canada en janvier, après une longue bataille judiciaire.
« Les débats sont suspendus et reprendront le 9 mai », a déclaré la juge Sauda Murererehe du Tribunal de grande instance de Nyarugenge, dans la ville de Kigali.
Le procès n’avait pas pu débuter le 2 février, suite à une requête de l’accusé qui ne s’estimait pas valablement défendu. Il avait alors demandé et obtenu un délai de deux mois pour pouvoir étoffer son équipe de défense. Cette dernière ne comprenait alors qu’un avocat, Maître Donat Mutunzi, du barreau de Kigali, alors que, selon l’accusé, l’affaire devrait mobiliser en tout six défenseurs canadiens, deux Rwandais et un Américain.
Lundi matin, c’est seulement en compagnie de Me Mutunzi que Mugesera s’est présenté devant la juge Sauda Murererehe. Il a demandé un nouveau report d’un mois pour compléter son équipe. Mardi, la juge lui accordé ce délai supplémentaire mais a décidé que les débats se dérouleraient en kinyarwanda, faisant ainsi droit à une requête de l’accusation.
A l’audience de lundi, l’accusé avait fait valoir qu’il venait de passer près de 20 ans dans un pays non-rwandophone et qu’il ne pas connaissait la terminologie juridique en langue rwandaise.
Suivant le raisonnement de la partie adverse, la juge a déclaré mardi que Mugesera avait toujours utilisé le kinyarwanda, qui est sa langue maternelle, et que le discours incriminé avait été prononcé en kinyarwanda.
« L’ordonnance est partiellement intéressante même si nous avons été déboutés sur certains points. Le report nous a été accordé. Il reste maintenant à voir avec mon client si nous allons faire appel ou non sur la question de la langue », a réagi Me Mutunzi, interrogé par l’agence Hirondelle à la sortie de l’audience.
« Pour nous, c’est une bonne décision. Nous avons obtenu ce que nous avions demandé », a pour sa part déclaré le procureur Ndibwami Rugambwa.
Originaire du nord du Rwanda, Mugesera avait réussi à repousser son extradition durant plusieurs années grâce à de multiples recours judiciaires.
A l’époque du discours, il était vice-président pour la préfecture de Gisenyi (nord) du parti de l’ex-chef de l’Etat Juvénal Habyarimana dont l’assassinat dans la soirée du 6 avril 1994 avait déclenché le génocide.
Dans sa célèbre intervention, l’orateur avait appelé les Hutus à renvoyer les Tutsis « chez eux en Ethiopie », en les faisant passer par la rivière Nyabarongo, dans laquelle des Tutsi furent jetés vifs ou morts deux ans plus tard. SRE-ER/GF