Fort du soutien de l’Union africaine et du Nigéria, Chile Eboe-Osuji a été élu juge à la Cour pénale internationale (CPI) en décembre 2011. Le 16 mars, il a été assigné à l’affaire Banda/Jerbo.
Les deux commandants rebelles sont accusés de crimes de guerre commis lors de l’attaque de la base militaire de la Mission de l’Union africaine au Soudan (MUAS), à Haskanita, au sud Darfour, le 29 septembre 2007. Douze soldats de la paix avaient été tués au cours des combats, parmi lesquels neuf Nigérians.
Dans leur requête, maîtres Karim Khan et Nick Koumjian, relèvent quatre raisons de douter de l’impartialité du juge dans cette affaire : le fait qu’il partage la nationalité des forces contre lesquelles les accusés se sont battus, qu’il partage la nationalité du principal groupe de victimes, que sa candidature a été approuvée par l’Union africaine et le gouvernement du Nigéria et enfin la publication d’un commentaire tendancieux sur son blog.
Le code de procédure de la Cour ne prévoit pas explicitement qu’un juge puisse être disqualifié en raison de sa nationalité. Mais les avocats estiment que les Etats, en ratifiant le traité de la Cour, attendent que « la justice administrée soit impartiale » et dès lors, « n’abandonneraient pas leurs propres soldats à une justice administrée par des ressortissants de pays contre lesquels ils ont combattus ».
Pour les avocats, la présence du juge nigérian dans l’affaire pourrait nuire à leurs clients, qui assurent que les militaires de la Mission de l’Union africaine, basés à Haskanita, ont transmis des informations au gouvernement soudanais et ont dès lors assisté le Soudan « dans sa campagne criminelle contre la population civile du Darfour et son offensive militaire contre les mouvements révolutionnaires ». Ils estiment donc que le jugement aura « des implications politiques inévitables pour l’UA et le Nigéria », dont les officiers commandaient la base d’Hashkanita.
Les avocats notent par ailleurs que quatre juges au sein de la CPI viennent de pays qui ont contribué aux troupes de la MUAS et que tous les quatre ont été, à différents stades, assignés à l’affaire. Ils rappellent que la procédure d’attribution des différentes affaires aux juges est « entièrement discrétionnaire » et « opaque », et laissent entendre que dans cette affaire, le choix des juges n’est pas innocent.
Abdallah Banda et Saleh Jerbo n’ont pas été incarcérés mais font l’objet de citations à comparaître émises le 27 août 2009. Ils ont comparu pour la première fois devant la Cour en juin 2010.
SM/ER/GF