Ingénieur agronome de formation, Gatete était, au moment du génocide des Tutsis de 1994, directeur au ministère de la Famille et de la promotion féminine, un poste auquel il avait été nommé une année auparavant après avoir dirigé d’une main de fer sa commune natale de Murambi (préfecture de Byumba, est du pays).
Le 29 mars 2011, l’ancien responsable avait été condamné à la perpétuité après avoir été jugé coupable de génocide et extermination. Le crime d’entente en vue de commettre le génocide avait été également trouvé établi mais les faits qui le fondaient étaient, selon la chambre, les mêmes que pour le chef de génocide.
Les juges avaient donc écarté la conspiration et retenu uniquement le génocide.
A l’audience d’appel lundi mardi, Priya Narayanan, du bureau du procureur, a soutenu que la chambre avait abusé de sa discrétion.
« Nous demandons à la chambre d’appel de prononcer une condamnation séparée et additionnelle pour le crime de conspiration », a-t-elle déclaré, expliquant qu’il s’agit d’un crime spécialisé qui ne peut en être confondu avec le génocide.
Ce crime suppose un accord qu’il faut punir séparément, a-t-elle plaidé, invoquant la jurisprudence de certains tribunaux.
« Un joli problème de droit international ! », a pour sa part estimé Marie-Pierre Poulain, après avoir préalablement appelé les juges d’appel de rendre l’ancien responsable à sa famille.
L’avocate de Gatete a expliqué que les écoles étaient encore loin d’être unanimes sur la définition de l’entente en vue de commettre le génocide. Pour elle, la conspiration se confond avec le génocide lorsque les deux chefs sont étayés par les mêmes faits. Même si, a-t-elle souligné, il n’y a pas la moindre preuve de la participation de son client à un plan visant à commettre le génocide des Tutsis.
Au premier degré, Gatete a été reconnu coupable d’avoir ordonné, aidé et encouragé les massacres de Tutsis en trois endroits dans les préfectures de Byumba et Kibungo en avril 1994.
D’abord le 7 avril 1994, au bureau du secteur Rwankuba, dans la commune Murambi, puis le 11 avril à l’église paroissiale de Kiziguro, dans la même commune, et enfin le 12 avril à l’église paroissiale de Mukarange, dans la commune Kayonza (préfecture de Kibungo).
Intervenant en dernier lundi après-midi, l’ancien haut fonctionnaire a clamé son innocence, affirmant qu’il fuyait l’avancée des rebelles du Front patriotique rwandais (FPR) en avril 1994.
L’arrêt de la chambre d’appel ne sera pas rendu avant plusieurs semaines.
ER/GF
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