L'examen de la requête du parquet demandant la mise en examen d'Agathe Habyarimana, veuve du président du Rwanda tué en 1994, qui a jusqu'à présent échappé à des poursuites dans l'enquête sur son rôle lors du génocide des Tutsi, a été renvoyé mercredi au 21 mai, a appris l'AFP de source judiciaire.
La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris devait examiner mercredi, à huis clos, la requête du parquet national antiterroriste (Pnat), compétent pour les crimes contre l'humanité, demandant sa mise en examen pour "entente établie en vue de commettre un génocide et des crimes contre l'humanité", l'élargissement de l'enquête au 1er mars 1994 et de nouvelles investigations.
Agathe Kanziga, veuve de Juvénal Habyarimana, le président hutu dont l'assassinat le 6 avril 1994 avait déclenché les massacres contre la minorité tutsi, est visée depuis 2008 par une enquête en France pour complicité de génocide et de crimes contre l'humanité, ouverte après une plainte du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR).
Aujourd'hui âgée de 82 ans, elle est présentée par ses accusateurs comme l'une des dirigeantes - ce qu'elle réfute - de l'"akazu", le premier cercle du pouvoir hutu qui aurait orchestré le génocide.
Elle avait été exfiltrée le 9 avril 1994 en Europe avec sa famille à la demande du président français François Mitterrand, proche de son mari.
Depuis, la France a refusé de l'extrader au Rwanda, sans toutefois lui accorder l'asile, en raison des soupçons sur le rôle qu'elle a pu jouer dans l'une des pires tragédies du XXe siècle. Installée en France depuis 1998, elle y vit sans statut légal.
En 2016, elle a été placée sous le statut intermédiaire de témoin assisté. En février 2022, la juge d'instruction chargée du dossier avait annoncé la clôture des investigations, une décision qui augurait d'un non-lieu. Sa défense avait notamment soulevé le "délai déraisonnable" de l'enquête.
Mais le Pnat a demandé de nouvelles investigations en août 2022, puis a demandé le 3 septembre 2024 à la juge d'instruction de la mettre en examen.
La juge n'ayant pas répondu dans un délai imparti, le Pnat a saisi la cour d'appel le 12 septembre.
Dans un entretien à l'AFP en mars 2024, l'ancien procureur national antiterroriste, Jean-François Ricard, expliquait qu'il lui était reproché "en quelque sorte les mots d'ordre qu'elle aurait pu donner, les incitations".
D'avril à juillet 1994, le génocide au Rwanda a fait selon l'ONU 800.000 morts, membres de la minorité tutsi ou Hutu modérés, tués par les Forces armées rwandaises (FAR) et les milices extrémistes hutu Interahamwe.