Le ministre philippin de la Justice, Jesus Remulla, a démenti jeudi toute coordination avec les enquêteurs de la Cour pénale internationale (CPI) pour leur livrer l'ancien président Rodrigo Duterte, alors que Manille se refusait jusqu'ici à coopérer avec le tribunal.
L'ancien chef d'Etat Rodrigo Duterte, 79 ans, a été arrêté le 11 mars et transféré le lendemain à La Haye à la CPI, qui le réclamait pour crimes contre l'humanité pour de nombreuses exécutions extrajudiciaires commises au nom de la guerre contre la drogue.
Lors d'une audition au Sénat réclamée par des proches de la famille Duterte, M. Remulla a assuré que le gouvernement avait tenu la CPI "à distance" jusqu'à la réception du mandat d'arrêt d''Interpol.
"Nous n'avons jamais eu la moindre communication avec la CPI jusqu'à maintenant, ni officielle ni officieuse", a assuré le secrétaire d'Etat, durant l'audition demandée par une proche de la fille de l'ancien président arrêté, la vice-présidente Sara Duterte, elle aussi en disgrâce auprès du président Ferdinand Marcos.
Imée Marcos est la soeur aînée du président Marcos et amie de Sara Duterte. Selon elle, la notice d'Interpol suggère qu'il y a eu une plus grande coordination que ne veut le dire le gouvernement.
"Cette note est transmise après des consultations préalables avec le gouvernement des Philippines qui a accepté de se conformer avec cette requête d'arrestation", indique la notice datée du 10 mars.
Une formule d'usage, a balayé M. Remulla: "Quand il est mentionné qu'ils se sont coordonnés avec le gouvernement de la république des Philippines, je me demande à qui ils ont parlé ici car ce n'était pas nous".
Le gouvernement Duterte a longtemps refusé de coopérer avec la CPI après que le tribunal a commencé à s'intéresser aux exécutions extrajudiciaires systématiques durant son mandat (2016-2022) et retiré les Philippines comme partie au traité en 2019.
Son successeur Ferdinand Marcos a refusé de réadhérer à la CPI après son élection en 2022 sur un ticket l'associant à Sara Duterte et continué à écarter toute coopération avec ses enquêteurs jusqu'à ces dernières semaines.
Les relations avec sa vice-présidente et entre les deux puissantes familles se dégradant, l'attitude de M. Marcos s'est infléchie.
"Tout ça, c'est politique. L'administration utilise les ressources du gouvernement et de la CPI pour détruire l'opposition", a accusé Sara Duterte, qui participait à l'audition au Sénat par visioconférence depuis La Haye.
Dans un point presse en ligne, elle a ensuite appelé les électeurs à voter pour les dix candidats de son parti aux prochaines élections sénatoriales en mai.
Mme Duterte est visée par une procédure de destitution, accusée d'avoir comploté l'assassinat du président Marcos. Un procès au Sénat doit décider de son avenir politique.