La Cour du district de Stockholm avait déjà jugé plusieurs cas de crimes de guerre commis au cours du conflit des Balkans dans les années 1990. Jusqu’ici, la justice à Stockholm s’est gardée de révéler l’identité de l’accusé. Mais pour les observateurs rwandais, et en particulier, ceux vivant en Suède, il s’agit de Stanislas Mbanenande. Il a été formellement inculpé le 05 novembre pour génocide incluant les crimes de meurtre, tentative de meurtre et enlèvement selon l’organisation Trial. Il a plaidé non coupable.
Massacres à Biseseso et au chef-lieu de la préfecture
Né le 26 août 1958, Mbanenande est un ingénieur civil originaire de la préfecture de Kibuye (ouest) où il enseignait en 1994. C’est là qu’il aurait, selon l’accusation, recruté des personnes, souvent de jeunes étudiants, et se serait érigé en dirigeant de facto d’une milice au cours du génocide. Il est accusé d’avoir participé activement à quatre massacres de Tutsis entre le 6 avril et le 30 juin 1994 dans les régions de Bisesero et Ruhiro, dans cette province occidentale du Rwanda. Plus de 50.000 personnes environ y ont été tuées. Mbanenande aurait également pris part à un massacre le 17 avril 1994 au chef-lieu de la préfecture où des hommes, des femmes et des enfants s’étaient réfugiés à l’intérieur et autour d’une église catholique et d’un centre hôtelier. La plupart de ces personnes étaient sans armes et venaient chercher protection dans cette zone, suivant le conseil des autorités.
Des groupes armés ont forcé ces personnes à rester dans la zone et pendant plusieurs jours, des centaines de miliciens, policiers et civils ont attaqué et tué la majorité de ces réfugiés. Les agresseurs ont utilisé des armes à feu, des grenades, des machettes et d’autres armes. Le procureur suédois affirme que les assaillants ont enfumé les réfugiés avant de les tuer une fois dehors. De nombreuses personnes sont mortes noyées en essayant de fuir par le lac Kivu. Mbanenande est accusé d’avoir tiré à l’arme automatique sur un groupe de personnes qui tentait de gagner le lac. Il aurait par ailleurs tué un homme en frappant à de nombreuses reprises sa tête avec une pierre et un bloc de béton. L’ancien enseignant nie toutes ces allégations et se dit victime d’une campagne de dénigrement orchestrée depuis Kigali.
Juges et parties se déplaceront à Kigali
Le procès devrait durer jusqu’à mai 2013 et certaines auditions se tiendront au Rwanda, en vidéoconférence, une technologie dont le pays s’est doté récemment. Fin novembre, juges, procureur, avocat de la défense et représentants des victimes devraient se rendre à Kigali pour entendre des témoins.
Mbanenande qui ne sera pas de la partie, pourra suivre les interrogatoires depuis la cour stockholmoise. Selon l’ONG Trial, l’accusation appellera plus de 40 témoins dont 19 survivants des tentatives de meurtres attribuées à Mbanenande. Kigali avait souhaité le juger devant ses propres tribunaux mais la demande d’extradition a été rejetée car l’accusé venait d’obtenir la nationalité suédoise.
Selon une source au parquet général à Kigali, Mbanenande a été jugé et condamné par contumace à la perpétuité en 2009 par un tribunal populaire gacaca de son village d’origine. Mais la Suède ne reconnaît pas les cours gacacas.
ER/GF