Le Ministère public de la Confédération suisse avait été saisi par l’ONG Track Impunity Always (TRIAL). «Nous avons examiné cette dénonciation et nous avons décidé d’ouvrir une procédure pénale contre la société concernée pour présomption de blanchiment d’argent en relation avec un crime de guerre et de complicité de crime de guerre», a précisé une porte-parole du Ministère public cité par le quotidien genevois. La société clame son innocence.TRIAL, une ONG suisse, se fonde notamment sur des enquêtes menées sous l’égide du Conseil de sécurité de l’ONU à l’encontre d’hommes d’affaires africains ayant trempé dans ces trafics d’or et d’armes. Des experts de l’ONU avaient mené des enquêtes en 2004-2005 sur les pillages de minerais en RDC, dans le cadre de la surveillance de l'embargo sur les armes à destination de ce pays. Toutes les entreprises africaines impliquées dans cette affaire avaient alors été sévèrement sanctionnées par le Conseil de sécurité, contrairement aux entreprises occidentales, malgré les recommandations du Groupe d'experts, déplore TRIAL.Selon cette ONG, le Front des nationalistes intégrationnistes (FNI), un groupe armé alors actif dans le nord-est de la RDC, avait continué à exploiter une concession aurifère, en violation de l'embargo du Conseil de sécurité, pour financer ses opérations et acheter des armes. Une part importante de cet or a été achetée par des intermédiaires qui l’ont revendue, à leur tour, à la grande société suisse. «Argor-Heraeus devait savoir que l’or acheté provenait de pillages», soutient l’ONG. La société a «rejeté » les allégations « avec fermeté», en expliquant que l’enquête diligentée par l’ONU en 2005 l’avait innocentée. Elle a encore assuré que cette enquête, à laquelle avait également participé le gouvernement suisse, avait conclu que «la compagnie n’avait en aucun cas été impliquée dans cette affaire, ni directement ni indirectement».Les actes de pillages peuvent constituer, lorsqu’ils sont commis dans le cadre d’un conflit armé, des crimes de guerre. Le fait d’ordonner ces pillages ou de les encourager d’une façon ou d’une autre, constitue aussi un crime comme l’a démontré la justice pénale internationale. Ainsi, parmi les crimes de guerre retenus à charge de l’ancien président du Libéria, Charles Taylor, condamné à 50 ans de prison, figurent des pillages commis en Sierra Leone par les rebelles du Front révolutionnaire uni (RUF). Selon le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL), l’appui militaire, opérationnel et financier apporté par Taylor au RUF a aidé et encouragé les rebelles à commettre ces crimes.ER