27.02.14 - SÉNÉGAL/HABRÉ - AFFAIRE HABRÉ : L’ÉTAT TCHADIEN SE CONSTITUE PARTIE CIVILE, LES VICTIMES PROTESTENT

Arusha, 27 février 2014 (FH) - L’Etat tchadien s’est constitué mardi partie civile dans le dossier de l’ancien président Hissène Habré, une démarche aussitôt dénoncée par les victimes qui demandent aux Chambres africaines extraordinaires de déclarer la plainte irrecevable.

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Ces chambres spéciales ont été créées au sein de la justice sénégalaise pour juger Hissène Habré, en exil à Dakar depuis décembre 1990.L’ancien président a été arrêté le 30 juin 2013 à son domicile et inculpé, deux jours plus tard, pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre et torture. « En entrant dans la procédure, nous, République du Tchad, voulons aider les Chambres africaines à faire un procès. Nous tenons à ce procès qui permettra d’abord à beaucoup de familles victimes de faire leur deuil », a indiqué le ministre tchadien de la Justice, Béchir Madet, après avoir déposé la plainte à Dakar.L’un des avocats de l’Etat tchadien, Silibu Simet, a expliqué que le pays avait subi un préjudice financier énorme. «  Ce préjudice financier nécessite une constitution de partie civile. Il y a toute une gamme d’infractions qui sont limitativement énumérées... C’est l’Etat tchadien qui a subi le préjudice économique qui est habilité à se constituer partie civile pour faire valoir ses intérêts uniquement s’agissant des crimes économiques », a déclaré Me Simet.Pour le Collectif des avocats des victimes du régime Hissène Habré, se constituer partie civile dans cette affaire n’est pas le rôle de l’Etat tchadien.« La tentative » des autorités tchadiennes « n’a pas de base juridique et devrait être déclarée irrecevable », écrit le Collectif dans un communiqué. « Seules des personnes physiques, victimes directes ou indirectes des crimes commis pendant le régime de Hissène Habré peuvent se constituer parties civiles devant les Chambres. Les parties civiles que nous représentons ont toutes souffert des exactions commises de 1982 à 1990 », argumentent ces avocats.« Plutôt que d’essayer de se constituer partie civile dans une procédure dont les victimes sont les seuls artisans au prix de 23 années de lutte difficile et pénible, l’Etat tchadien aurait pu, dès la chute du régime de Habré, se résoudre à intenter une action en récupération de la fortune emportée par Hissène Habré lors de sa fuite », ajoute le communiqué. Pour leur part, Hissène Habré et ses avocats boycottent les Chambres africaines dont ils contestent la légalité. Ainsi, l’ancien président a refusé il y a deux semaines de répondre aux questions du procureur et des juges d’instruction qui l’avaient convoqué. C’est ce que l’un de ses avocats, El Hadji Diouf, a appelé « l’attitude du mépris et du silence ».ER