Le linguiste rwandais est jugé par la Haute Cour de Kigali, notamment pour incitation publique et directe à commettre le génocide des Tutsis de 1994 à travers un discours en langue rwandaise prononcé en novembre 1992 dans le nord du pays. Ouvert en janvier 2013, le procès avance très lentement suite aux nombreuses demandes de la défense.
Mardi, la chambre présidée par le juge Athanase Bakuzakundi, a infligé à Me Rudakemwa une amende de 400.000 francs rwandais (environ 600 dollars US), lui reprochant de retarder la procédure sans raison sérieuse. Les juges se sont fondés, dans leur décision, sur l’article 15 al.2 du code de procédure civile et commerciale relatif aux manœuvres dilatoires.
L’avocat, qui était absent à l’audience de mardi, avait envoyé une lettre lue par le juge-président. Me Rudakemwa y expliquait qu’il était retenu au ministère de la Justice pour des discussions relatives au paiement de ses honoraires.Mugesera étant considéré comme indigent, il appartient au gouvernement rwandais de supporter les coûts de sa défense.
L’accusation a aussitôt pris la parole pour demander des sanctions arguant que le défenseur avait manqué de respect à la chambre, décidant lui-même de suspendre la procédure, au lieu de venir plaider sa requête devant les juges. Le représentant du procureur a rappelé que Me Rudakemwa avait, par le passé, claqué la porte en pleine audience.
La chambre a suivi le raisonnement du procureur et a, ainsi, infligé la sanction, en donnant un mois à l’avocat pour payer l’amende.Dans un renversement de rôles, c’est l’accusé, Mugesera, qui a pris la défense de son avocat, absent. « Les gens du bureau du procureur continuent de plaider parce qu’ils sont payés. Ils ne devraient donc pas s’acharner contre celui qui réclame son dû », a clamé le linguiste.
Me Rudakemwa était présent à la reprise des débats jeudi mais aucune allusion n’a été faite à la décision de l’avant-veille. En marge de l’audience, l’avocat de la défense a confié à l’Agence Hirondelle qu’il avait décidé de saisir la Cour Suprême. « Je vais demander à la Cour suprême d’annuler cette décision car l'article invoqué ne s'applique pas à mon cas », a-t-il dit, indiquant qu’il présenterait ses arguments devant les juges de la plus haute instance judiciaire.SRE/ER/JC