Le président du Kenya a mis fin aux supputations lundi après-midi lors d'un discours prononcé devant une séance extraordinaire des deux chambres du Parlement réunies. « Je prends la décision extraordinaire d'être présent à conférence de mise en état », a déclaré le chef de l'Etat dont le discours était retransmis en direct par les télévisions du pays. Il a expliqué qu'il ne voulait pas mettre en péril la souveraineté de son pays. Uhuru Kenyatta a précisé qu'en son absence, ses pouvoirs de chef de l'Etat seraient délégués à son vice-président William Ruto également poursuivi par la CPI.Elu dès le premier tour en mars 2013, Uhuru Kenyatta est poursuivi pour crimes contre l'humanité perpétrés dans son pays lors des violences qui avaient suivi les élections générales de fin 2007.Au début de la semaine dernière, la Cour pénale internationale avait rejeté une requête urgente du président kényan, qui avait demandé l'autorisation de ne pas être présent en personne à la conférence de mise en état de mercredi prochain.Les juges avaient souligné l'importance de cette réunion dans ce dossier.Mercredi, les discussions porteront notamment « l'état de la coopération entre l'accusation et le gouvernement du Kenya », selon communiqué de la CPI.La procureure de la CPI, Fatou Bensouda, accuse en effet les autorités kényanes de ne pas lui communiquer certains documents qu'elle estime pourtant nécessaires pour établir la responsabilité pénale de M. Kenyatta. Nairobi, pour sa part, affirme coopérer pleinement.
Feuilleton judiciaire
Le 28 août dernier, la chambre avait ordonné à l'équipe de Mme Bensouda de déposer un avis confirmant ou pas si elle était en mesure de commencer le procès le 7 octobre, comme initialement programmé.Le 5 septembre, la procureure avait demandé d'ajourner le procès, arguant que le gouvernement du Kenya n'avait pas encore communiqué tous les documents demandés en avril.Dans leur réponse à la notification de l'accusation, cinq jours plus tard, les avocats du président Kenyatta avaient demandé à la chambre de mettre fin à la procédure, affirmant que le dossier de Mme Bensouda ne pouvait tenir la route.Cette affaire n'en est pas à sa première péripétie. Alors que l'ouverture du procès était attendue pour le 5 février dernier, la procureure Fatou Bensouda avait demandé un délai supplémentaire, le 19 décembre 2013, suite au retrait de témoins clés.Dans ce feuilleton judiciaire, l'accusation est confrontée non seulement au revirement de témoins mais aussi à une forte pression de la part de certains dirigeants africains.Depuis l'élection d'Uhuru Kenyatta et de son vice-président William Ruto, l'Union africaine (UA) s'est mobilisée, soutenant que des personnalités de ce rang, encore en fonctions, ne devraient pas être poursuivies par la CPI.Mais le jeune président kényan a fait un choix contraire pour mercredi prochain. Parce qu'il espère, selon des analystes au Kenya, que ses avocats vont convaincre la chambre de classer le dossier, faute de preuves.Uhuru Kenyatta ne sera pas le seul hôte de marque kényan à La Haye mercredi prochain. En effet, près d'une centaine de députés et sénateurs de son pays ont déjà demandé et obtenu le visa pour pouvoir l'accompagner au siège de la Cour.ER