Vingt ans après le début de l'enquête, le parquet de Paris a annoncé mercredi avoir demandé un non-lieu pour le prêtre rwandais Wenceslas Munyeshyaka, mis en cause dans le génocide de 1994 et qui s'était installé en 1995 en France où il a été mis en examen.
Il appartient désormais aux juges d'instruction d'ordonner ou non son renvoi devant une cour d'assises.
Le prêtre catholique, premier Rwandais visé par une plainte en France pour génocide, avait été mis en examen en 1995 et a été accusé par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), qui s'est dessaisi au profit de Paris. Il a toujours clamé son innocence.
"S'il ressort des investigations que le rôle de Wenceslas Munyeshyaka durant le génocide de 1994 a pu susciter de très nombreuses interrogations en raison, notamment, de son comportement mais aussi des propos qu'il a cru devoir tenir pendant et après le génocide (...) l'instruction n'a pas permis, au final, de corroborer de façon formelle des actes précis et certains (de sa) participation active" comme auteur ou complice, indique le procureur de la République, François Molins, dans un communiqué.
Alors âgé de 35 ans, Wenceslas Munyeshyaka était vicaire de la paroisse de la Sainte-Famille à Kigali, qui accueillait des réfugiés pendant le génocide au cours duquel 800.000 personnes, principalement tutsi, ont été massacrées entre avril et juillet 1994, selon les chiffres de l'Onu.
Dans l'acte d'accusation de 2005, le procureur du TPIR lui reprochait d'avoir participé à des réunions planifiant des massacres et d'avoir livré des civils tutsi aux milices hutu. Il était aussi accusé d'avoir lui-même abattu trois jeunes Tutsi, encouragé ou commis des viols.
Le prêtre, qui officie aujourd'hui à Gisors (Eure), a toujours clamé son innocence, affirmant avoir fait de son mieux pour aider les civils et assurant avoir fui Kigali car les "miliciens" lui "reprochaient d'avoir protégé les Tutsi".
Exilé en France avec l'aide de l'Église, qui lui a apporté son soutien, il avait été arrêté en Ardèche et mis en examen fin juillet 1995. Remis en liberté, il avait de nouveau été interpellé à la suite du mandat d'arrêt délivré par le TPIR, puis de nouveau libéré sous contrôle judiciaire.
Entre vingt et trente procédures judiciaires sont ouvertes en France en lien avec le génocide contre des Rwandais qui ont quitté leur pays. Dans le premier procès à Paris, l'ancien officier de la garde présidentielle Pascal Simbikangwa a été condamné en 2014 à 25 ans de réclusion criminelle pour génocide et complicité de crimes contre l'humanité. Il a fait appel.
Attendu en 2016, le second procès concerne les deux anciens bourgmestres Tito Barahira et Octavien Ngenzi.