Pékin affiche sa puissance militaire pour commémorer la fin de la 2e Guerre mondiale

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Plus de 12.000 soldats, des chars, 200 avions... Pékin s'apprête à célébrer en grande pompe jeudi la fin de la Deuxième guerre mondiale, avec un défilé militaire destiné à afficher la puissance chinoise mais boudé par les pays occidentaux.

Le président chinois Xi Jinping supervisera en personne le 3 septembre le 70e anniversaire de ce que Pékin appelle "la victoire de la guerre de résistance du peuple chinois contre l'agression japonaise et de la guerre mondiale contre le fascisme".

L'évènement commémore la capitulation du Japon, le 2 septembre 1945, et la fin de l'occupation de la Chine par l'armée nippone. Avec comme point d'orgue une grande parade militaire place Tiananmen, symbole du pouvoir central.

Rien ne doit troubler le spectacle: 850.000 "volontaires" ont été mobilisés pour surveiller les rues, des quartiers entiers seront bouclés et les aéroports fermés pour quelques heures.

Nombre d'usines ont été arrêtées dès mi-août pour garantir un ciel bleu sans pollution.

Alors que la Chine veut s'imposer comme une puissance mondiale sur la scène diplomatique, à l'égal des Etats-Unis, ce défilé prend des allures de démonstration de force.

Et ce dans un contexte géopolitique tendu, sur fond de vifs différends territoriaux entre Pékin et ses voisins, en mer de Chine du sud et mer de Chine orientale.

Ces commémorations interviennent par ailleurs après une violente débâcle boursière, qui a ravivé les inquiétudes sur l'essoufflement de l'économie chinoise et l'incapacité du régime à relancer l'activité.

Les principaux dirigeants occidentaux seront absents, du président américain Barack Obama à la chancelière allemande Angela Merkel, ainsi que le Premier ministre japonais nationaliste Shinzo Abe.

Mais plutôt qu'un improbable succès diplomatique, Pékin cherche surtout à afficher à l'échelle nationale son importance croissante sur la scène mondiale, soulignait John Delury, de la Yonsei University à Séoul.

"C'est une classique projection de pouvoir. Ils essaient d'attirer autant d'attention que possible, d'afficher la puissance retrouvée du pays", a-t-il indiqué à l'AFP.

- 'Faux-pas immoral' -

Le défilé mettra en scène plus de 12.000 soldats et toute une panoplie d'équipements militaires, dont 84% seront présentés publiquement pour la première fois, selon l'Armée populaire de libération (APL). Près de 1.000 militaires étrangers y participeront.

Selon des médias étatiques, on y verra des appareils de l'aéronavale, des bombardiers ou divers missiles, tous fruits d'un budget militaire chinois en expansion continue.

Les chefs d'Etat du Kazakhstan et du Venezuela, mais aussi le président soudanais Omar el-Béchir, sous le coup de mandats d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI), seront présents.

Le président russe Vladimir Poutine sera également là --Xi avait assisté en mai à un évènement similaire à Moscou, boudé par les pays occidentaux en raison de la crise ukrainienne.

Son homologue sud-coréenne Park Geun-Hye --dont le pays avait été colonisé par le Japon--, le président sud-africain Jacob Zuma et le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon ont aussi répondu positivement à l'invitation chinoise.

La perspective d'un déploiement militaire place Tiananmen, où l'armée avait réprimé les manifestations prodémocratiques en 1989, a pu contribuer à dissuader des responsables occidentaux.

"La Chine est restée sereine quant à l'absence de certains dirigeants occidentaux", a relevé le journal officiel Global Times.

En revanche, "le Japon se dérobe" alors que l'invasion de la Chine a fait entre 15 et 20 millions de morts, et l'absence de ses dirigeants est "un faux-pas immoral" qui "ridiculise" Tokyo, a tancé le quotidien.

- 'La nation tout entière' -

Certes, le porte-parole du ministère de la Défense Yang Yujun a insisté: "Le défilé ne vise aucun pays, il ne vise pas le Japon d'aujourd'hui et n'est pas dirigé contre le peuple japonais".

Mais les médias officiels et la télévision centrale enchaînent articles et émissions rappelant ad nauseam les atrocités et crimes de guerre des Japonais, tout en célébrant les héros communistes combattant l'envahisseur nippon.

La propagande officielle insiste sur la résistance "de la nation chinoise tout entière" contre le Japon, sous l'égide du Parti communiste... en éclipsant le rôle décisif des forces nationalistes de Chiang Kai-shek, à l'époque au pouvoir.

"Le message que (les dirigeants) tentent de faire passer, c'est: +Regardez, nous sommes du bon côté de l'Histoire, nous étions les gentils qui combattions les méchants+", observe M. Delury. Un moyen donc de conforter la légitimité du régime communiste.