La paix commence à se dessiner en Colombie : le président Juan Manuel Santos et le numéro un des Farc Timoleon Jimenez, dit "Timochenko", se réunissent pour la première fois mercredi à La Havane, prélude à une possible annonce décisive.
A cette réunion, prévue à 17H00 (21H00 GMT), "seront présents le président Santos, le président (cubain) Raul (Castro) et le commandant +Timochenko"+, a annoncé à l'AFP une source au sein de la délégation des Farc à Cuba, où sont menées les négociations de paix depuis novembre 2012.
Il s'agirait alors du premier face-à-face entre le président Santos et le chef des Farc, recherché pour homicide aggravé, terrorisme, enlèvement et rébellion. Ce serait aussi la première fois depuis 14 ans qu'un président colombien rencontre le dirigeant des Farc.
Un peu plus tôt, M. Santos avait annoncé sur son compte Twitter qu'il ferait escale dans la capitale cubaine "pour une réunion clé avec les négociateurs afin d'accélérer la fin du conflit".
"La paix est proche", a écrit le président, sans mentionner la présence du leader rebelle ni la durée de son séjour. Il est ensuite attendu à New York pour l'Assemblée générale de l'ONU.
C'est la première fois que le chef de l'Etat colombien se rend à la table des négociations de La Havane depuis le début des pourparlers de paix il y a près de trois ans. En août dernier, il avait envisagé pour la première fois une rencontre avec le chef des Farc.
Timoleon Jimenez "Timochenko", dont le vrai nom est Rodrigo Londonio Echeverri, âgé de 56 ans, se serait déjà rendu à Cuba cet été pour rencontrer les négociateurs, malgré la centaine de mandats d'arrêt émis contre lui.
Tout semblait indiquer mercredi que cette réunion porterait sur la justice, volet crucial des pourparlers de paix censés mettre fin à plus d'un demi-siècle de conflit, le plus ancien d'Amérique latine et le dernier encore en cours sur le continent.
"La justice est le noeud des négociations de paix", a assuré la présidence dans un communiqué, insistant sur le fait qu'un accord sur ce thème constituerait "un point de non-retour".
- Les mots du pape François -
Ce voyage "signifie qu'un accord sur la justice transitionnelle a déjà été trouvé", estime Jorge Restrepo, directeur du centre d'études spécialisé dans le conflit colombien (Cerac).
"Cela marquerait la fin de la phase de conflit et l'entrée dans la phase de transition vers le post-conflit", explique l'analyste.
Le 11 septembre dernier, le numéro deux des Farc Ivan Marquez avait assuré que les parties se trouvaient "aux portes" d'un accord sur ce thème, même si elles s'accusent d'atrocités dans ce conflit qui a fait officiellement quelque 220.000 morts.
A ce jour, les négociations ont permis de régler trois des six points figurant à l'ordre du jour, mais la question la plus épineuse demeurait celle de la justice transitionnelle pour les rebelles démobilisés.
Les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes), la plus importante guérilla du pays avec 7.000 combattants, refusent un accord impliquant de la prison pour ses guérilleros. De son côté le gouvernement se dit opposé à toute impunité.
Une sous-commission juridique paritaire a été chargée de définir des processus de sanction pour les auteurs de crimes contre l'humanité dans les deux camps. Elle s'est réunie à plusieurs reprises pour de brèves séances depuis fin juillet, en parallèle des discussions de La Havane.
Deux autres thèmes restent à l'agenda des pourparlers : la réparation aux victimes et les modalités de ratification d'un accord de paix définitif.
En voyage à Cuba ces derniers jours, le pape François avait lancé dimanche un appel pressant à un succès des négociations de paix colombiennes, estimant qu'"un échec de plus n'est pas permis".
Depuis le 20 juillet, les Farc observent un cessez-le-feu unilatéral, se réservant le droit de répliquer en cas d'attaque de l'armée.
De son côté, le gouvernement colombien a ordonné la suspension des bombardements contre la guérilla et envisage d'autres mesures pour favoriser une "désescalade" du conflit.
Ce conflit, auquel ont aussi participé d'autres groupes rebelles de gauche, des paramilitaires de droite et des narcotrafiquants, a fait au moins 220.000 morts et 6 millions de déplacés depuis plus de cinquante ans.