La notion de crime contre l'humanité, dont le concept a été créé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, est imprescriptible et désigne la violation délibérée des droits fondamentaux d'un individu ou d'un groupe pour des motifs "politiques, philosophiques, raciaux ou religieux".
C'est pour "crimes contre l'humanité" qu'une enquête pénale a été ouverte en France visant le régime de Bachar al-Assad, pour des exactions commises en Syrie entre 2011 et 2013.
Incrimination rétroactive, le crime contre l'humanité est le seul crime imprescriptible du droit français, conçu au départ pour juger les auteurs ou complices de la Shoah. Après la guerre en Yougoslavie et le génocide rwandais, le concept a été élargi et défini par la Cour pénale internationale, créée en 2002 et aujourd'hui tribunal permanent chargé de sanctionner ces crimes.
Défini le 8 août 1945 par l'article 6 des statuts du Tribunal international de Nuremberg, le crime contre l'humanité concerne "l'assassinat, l'extermination, la réduction en esclavage, la déportation et tout autre acte inhumain commis contre toute population civile, avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour des motifs raciaux ou religieux".
Il a été créé a posteriori pour juger les bourreaux nazis dont les crimes n'avaient pas été imaginés antérieurement, alors que les principes généraux du droit interdisent en temps ordinaire de condamner pour un acte qui, avant d'être commis, n'est pas défini et assorti d'une sanction.
Une loi française du 26 décembre 1964 déclare ces crimes imprescriptibles. C'est sur ce fondement que Klaus Barbie, Paul Touvier ou Maurice Papon seront inquiétés dans les années 1980.
Le 20 décembre 1985, la Cour de cassation élargit la notion de crime contre l'humanité: il peut s'agir aussi de crimes visant les adversaires de la "politique d'hégémonie idéologique" menée par un Etat totalitaire. La définition permet d'inclure les crimes contre la Résistance mais exclut d'éventuelles plaintes contre la politique coloniale de la France.
En janvier 1997, la Cour de cassation précise qu'il n'est pas nécessaire, pour être complice, d'avoir "adhéré à la politique d'hégémonie idéologique", ni "appartenu à une organisation déclarée criminelle par le tribunal de Nuremberg".
En 2001, la France reconnaît officiellement que la traite des Noirs et l'esclavage constituaient des crimes contre l'humanité.
Le crime contre l'humanité est défini de façon plus précise par le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) -- qui inclut notamment l'apartheid, la torture, le viol, les disparitions forcées, la réduction en esclavage -- et se généralise progressivement dans les droits nationaux.
La France, partie signataire au traité de Rome, a transposé en 2010 dans le droit national les crimes relevant de la compétence de la CPI.
Depuis 2012, les enquêtes judiciaires sont regroupées au pôle crimes contre l'humanité et les investigations confiées à un service spécialisé. Actuellement, 15 enquêtes préliminaires, portant sur onze pays différents, et 40 informations judiciaires, dont 26 sur le génocide rwandais, sont en cours, précise une source judiciaire.