La banque centrale américaine (Fed) devrait mercredi prendre la décision historique de relever ses taux d'intérêt, après sept ans de politique à taux zéro.
Après le verdict attendu à 19H00 GMT, sa présidente Janet Yellen tiendra une conférence de presse où elle devrait assurer que la progression des taux d'intérêt sera ensuite "graduelle" et que la politique monétaire restera "accommodante" afin de rassurer les marchés.
Ce sera la première fois en presque dix ans, depuis juin 2006, que la Fed agit sur les taux à la hausse.
Après l'éclatement de la bulle immobilière en 2008 et la récession qui s'en est suivie, la banque centrale a maintenu pendant sept ans les taux proches de zéro pour soutenir la reprise.
"Le marché pense que la Fed va relever les taux d'intérêt sur les fonds fédéraux. Ce serait une décision historique vu que ceux-ci sont à zéro depuis 2008, ce qui était plus long que ce que nous avions anticipé", a déclaré mardi l'ancien président de la Réserve fédérale Ben Bernanke dans un entretien au site d'informations économiques MarketWatch.
Janet Yellen, qui s'est récemment félicitée d'une croissance "modérée" de l'économie américaine accompagnée de "risques équilibrés", a averti que "beaucoup" de membres de la Fed estimaient qu'il était temps de relever les taux.
Le resserrement du crédit devrait être symbolique, de l'ordre d'un quart de point (0,25%).
"Ils ne vont pas relever de plus de 0,25% afin de ne pas surprendre les marchés qui ont déjà intégré une hausse de cet ordre", assure Stephen Oliner, économiste à l'American Enterprise Institute (AEI). Le taux interbancaire au jour le jour qui évoluait depuis fin 2008 entre 0 et 0,25% devrait donc passer à une fourchette de 0,25% à 0,50%.
La Fed divulguera aussi de nouvelles prévisions économiques sur la croissance, l'inflation et le taux de chômage.
Celui-ci est au plus bas depuis sept ans à 5%, approchant le plein emploi bien que le marché du travail ait encore une belle marge d'amélioration. De nombreux Américains ne trouvent pour l'instant qu'un travail à temps partiel.
L'inflation, que la Fed aimerait voir rejoindre l'objectif de 2%, est encore atone, déprimée par les bas prix du pétrole. Sur un an, elle se situe à 0,2% pour l'indice PCE, baromètre préféré de la Fed.
Mais, mardi, la publication de l'indice des prix à la consommation (CPI), hors prix de l'énergie et de l'alimentation, a montré une remontée à 2% pour la première fois en un an et demi, signalant un frémissement des prix des services.
- Et ensuite ? -
"Le timing est impeccable", a commenté Harm Bandholz, économiste pour UniCredit. "La Fed va relever les taux mercredi et signalera une progression graduelle des taux pour les trois années à venir", a-t-il commenté.
Les acteurs financiers seront tout à l'écoute des indices que pourrait donner Janet Yellen sur la voie que va suivre la Fed, après cette première hausse historique.
"Ce sera très progressif. Peut-être trois autres hausses au maximum l'année prochaine afin de se retrouver dans les environs de 1% fin 2016, peut-être même moins", affirme Stephen Oliner.
Les acteurs financiers s'interrogeront aussi sur les autres outils que la Fed pourrait utiliser pour ajuster sa politique monétaire en jouant notamment sur les intérêts payés sur les réserves excédentaires que les banques déposent à la Fed.
Le sort des actifs au bilan de la Banque centrale sera aussi en question, la Fed ayant accumulé pas moins de 4.500 milliards de dollars en bons du Trésor et créances immobilières à la faveur de ses rachats d'actifs lors de sa politique monétaire ultra-expansionniste. Jusqu'ici elle a indiqué que le produit de ces actifs serait réinvesti afin de conserver un environnement accommodant.
Au sein du Comité de politique monétaire (FOMC), au moins trois membres ont exprimé des doutes sur la date du relèvement des taux, préférant que la Fed attende que l'inflation donne des signes plus fermes de remontée et que les inquiétudes sur le ralentissement économique à l'étranger se dissipent.
Mais ils pourraient taire mercredi leurs objections s'ils ont l'assurance du Comité que l'évolution des taux sera très lente pour ne pas mettre en danger la reprise.