Corée du Sud: des millions d'euros de dommages alloués par la justice dans une affaire inventée d'espionnage

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La justice sud-coréenne a accordé des millions d'euros de dommages et intérêts aux victimes d'une affaire d'espionnage montée de toutes pièces voici quarante ans, a-t-on appris auprès du greffe mardi.

Un tribunal de Séoul a ordonné la semaine dernière au gouvernement de verser un total de 12,55 milliards de wons (9,7 millions d'euros) à 72 plaignants, qui recevront chacun entre quatre millions et un milliard de wons.

L'affaire Ulleungdo remonte à 1974.

Quarante-sept personnes avaient alors été arrêtées, dont la plupart venaient d'Ulleungdo, une île reculée de l'est du pays.

Sous la torture, elles avaient été obligées de livrer de faux aveux et de prétendre avoir monté un réseau clandestin dans le but de fomenter un soulèvement populaire pour renverser le gouvernement. Le tout sur ordre de la Corée du Nord.

Sur ces 47 personnes, 32 avaient été par la suite inculpées. Trois d'entre elles avaient été exécutées, quatre condamnées à la perpétuité et les autres à des peines allant de une à 15 années de prison.

A cette époque, le président autoritaire Park Chung-Hee, père de l'actuelle présidente Park Geun-Hye, régnait sur le pays d'une main de fer et était en train d'accentuer encore sa mainmise.

Ces arrestations avaient été menées par le renseignement sud-coréen, la Korean CIA, et avaient permis de détourner l'attention de l'opinion publique des manifestations en faveur de la démocratie qui avaient cours dans le pays.

Park Chung-Hee a dirigé la Corée du Sud pendant 18 ans, jusqu'à son assassinat en 1979 par le chef de la KCIA, Kim Jae-Kyu.

Le principe d'un procès en révision avait été décidé en 2010 après que la Commission sur la vérité et la réconciliation eut accepté un recours des victimes et de leur famille. En 2012, la Cour suprême avait acquitté la plupart des 32 inculpés, ce qui avait ouvert la voie à la procédure pour exiger des dommages et intérêts.

"Il est reconnu que les victimes ont été arrêtées illégalement, sans se voir notifier de mandats d'arrêt, qu'elles ont été torturées, passées à tabac continuellement ou soumises à des simulations de noyade, afin qu'elles passent aux aveux", a dit le tribunal dans un communiqué.

"L'Etat doit verser des dommages et intérêts aux victimes et à leur famille".

Nombre d'observateurs s'attendent à ce que le gouvernement fasse appel de cette décision en invoquant la prescription des faits.