La procureure de la Cour pénale internationale a affirmé jeudi, à l'ouverture du procès de Laurent Gbagbo, avoir obtenu "un grand nombre de preuves" démontrant la culpabilité de l'ex-président ivoirien dans les violences ayant déchiré son pays en 2010-2011.
Laurent Gbagbo, 70 ans, et son co-accusé Charles Blé Goudé, 44 ans, ancien chef de milice, sont poursuivis pour des crimes commis dans la crise née du refus de M. Gbagbo de céder le pouvoir à Alassane Ouattara, à l'issue de l'élection présidentielle de fin 2010.
"La Côte d'Ivoire a sombré dans le chaos et a été le théâtre de violences innommables", a déclaré la procureure Fatou Bensouda lors d'une audience publique à La Haye, où siège la CPI.
Les violences avaient fait plus de 3.000 morts en cinq mois, transformant en champ de bataille certaines zones du premier producteur mondial de cacao, moteur économique de l'Afrique de l'Ouest.
"Nous avons obtenu un grand nombre de preuves contre les deux accusés", a assuré Fatou Bensouda, arguant que M. Gbagbo avait tenté de s'accrocher au pouvoir "par tous les moyens".
L'accusation compte présenter 5.300 éléments de preuve lors du procès, qui doit durer entre trois et quatre ans.
"Lorsqu'il a compris que la présidence allait lui échapper, Laurent Gbagbo, en concertation avec des membres d'un cercle privé de proches, a commencé à mener une campagne de violences orchestrée contre ceux considérés comme ses opposants", a soutenu Mme Bensouda.
Ces attaques, perpétrées par des forces gouvernementales et des milices sous le contrôle des accusés, avaient un caractère "généralisé" et "systématique", a-t-elle affirmé.
MM. Gbagbo et Blé Goudé, qui plaident non coupable, doivent répondre de quatre crimes contre l'humanité : meurtres, viols, actes inhumains et persécutions.
"Bien qu'il ait été en position de le faire", selon Mme Bensouda, M. Gbagbo n'a "jamais ordonné que les violences cessent".
En réponse aux critiques lui reprochant de ne pas avoir lancé de poursuites contre des membres du camp Ouattara, Mme Bensouda a répété : "Nous enquêtons sur les deux côtés du conflit (...) cela prend du temps et nous demandons de la patience".
L'accusation devait poursuivre jeudi après-midi sa déclaration liminaire. La défense aura la parole vraisemblablement à partir de vendredi.