C’est l’histoire de deux Présidents et d’un vice-président, tous trois cette semaine face à la justice transitionnelle. C’est aussi les histoires de victimes de la répression qui de la Tunisie à la République Démocratique du Congo ou en Colombie cherchent justice et réparations.
Le premier Président déchu est le Tchadien Hissène Habré accusé de « crimes contre l’humanité » dont le procès s’est terminé jeudi à Dakar devant les Chambres Africaines Extraordinaires. Cette dernière semaine, les avocats des victimes ont pris une dernière fois la parole pour décrire ses dix ans de pouvoir absolu faits de violences, de répressions, de tortures et de viols. Ses avocats commis d’office ont plaidé l’acquittement et dénoncé un « complot international ». Le procureur un Sénégalais a demandé la prison à perpétuité. Hissène Habré, l’ancien protégé de l’Occident qui a longtemps fermé les yeux sur ses exactions au nom de la lutte contre le Libyen Kadhafi est resté muré dans le silence, dénonçant ce tribunal. Pourtant ce tribunal comme l’explique notre conseiller éditorial Pierre Hazan a finalement bien travaillé. « Dans ce procès sans précédent, tout ne fut pas parfait, loin de là. Mais il fut malgré tout, infiniment plus pédagogique que les abscondes querelles de procédure qui émaillent les interminables procès tenus à la Cour pénale internationale. Les autorités tchadiennes autorisèrent la retransmission télévisée des auditions, mais refusèrent que les anciens chefs de la DDS viennent témoigner à Dakar, en dépit d’un accord de coopération judiciaire entre les deux pays. Craignaient-elles une mise en cause du président Déby, qui, avant de renverser Hissène Habré, fut un temps son chef d’état-major ? ». Jugement le 30 mai.
L’autre Président déchu, c’est Laurent Gbagbo dont le procès qui devrait durer des mois et des mois s’est poursuivi devant la Cour Pénale Internationale. Avec tous les couacs, incidents et lenteurs de procédure dont cette Cour est coutumière. Les premières victimes des violences dont Gbagbo est accusé ont témoigné tandis que les juges de la CPI ont instamment demandé aux avocats de ne plus appeler leur client « Président ».
Toujours à la CPI, le vice-président kenyan William Ruto poursuivi pour « crimes contre l’humanité » a emporté une importante victoire symbolique. Les dépositions des témoins à charge qui se sont depuis rétractés ne pourront pas être retenues par la CPI, affaiblissant la procédure contre Ruto, seul homme d’Etat en activité poursuivi par la Cour internationale. Peu importe que ces témoins ont selon de nombreux témoignages été la cible de pressions et menaces.
Ailleurs, la transition démocratique patine. Comme en Tunisie, où les homosexuels sont toujours pourchassés au nom d’une loi inique datant de l’ère coloniale. Un de ces adolescents traqué par la police, dénoncé par sa famille, exclu de son lycée témoigne.
En République Démocratique du Congo, c’est la famille du défenseur des droits de l'homme congolais Pascal Kabungulu assassiné il y a dix ans qui en désespoir de cause a saisi les Nations Unies avec le soutien de l'ONG suisse TRIAL et du Centre canadien pour la justice internationale pour obtenir justice. Le 31 juillet 2005, des hommes armés en uniforme militaire ont tué Pascal Kabungulu sous les yeux de sa famille. Le défenseur avait déjà fait l'objet de plusieurs menaces en raison de son travail sur les droits humains au sein de l'organisation Héritiers de la Justice à Bukavu, dans le Sud-Kivu, une province de l'est de la RDC.
En Colombie, les populations indiennes se disent oubliées du processus de paix et de transition initié entre les Farc et le pouvoir. Comme l’écrit la correspondante de Justiceinfo.net à Bogota : « il y a encore beaucoup à faire pour que ces régions sortent de la logique d’inégalité et d’illégalité qui a alimenté le conflit colombien ».