L'ex-chef des "Jeunes patriotes" ivoiriens, Charles Blé Goudé jugé pour crime contre l'humanité devant la CPI, affirme dans un livre paru jeudi avoir été le voisin de cellule à Abidjan d'un jihadiste malien qui l'aurait prévenu des attaques en Côte d'Ivoire.
"Mohamed Abu Mustapha ou MAM (...) s'est empressé de me dire qu'il était l'homme à tout faire de Mokhtar Belmokhtar, le patron de Al-Mourabitoune, une union de factions djihadistes qui sévissaient dans le nord du Mali et auteur de plusieurs prises d'otages", écrit Blé Goudé dans son livre intitulé: "De l'enfer, je reviendrai", paru aux Editions du moment.
MAM le jihadiste, un Mauritano-Marocain, se laisse aller à des confidences sur la planification d'attaques sur le territoire ivoirien en représailles aux actions du chef d'Etat ivoirien Alassane Ouattara, alors président en exercice de la Cédéao (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest).
"Tu ne sais pas que c'est le président Alassane Ouattara qui a demandé à l'armée française de nous bombarder dans le nord du Mali alors qu'on avait déjà conquis le pays? En tout cas, même s'ils m'ont pris, tout le monde est décidé à réaliser l'opération", lit-on.
"Ici en Côte d'Ivoire, on a déjà fini nos repérages. Le Pullman hôtel, l'hôtel Ivoire (le plus grand hôtel du pays) et Assinie (une station balnéaire proche d'Abidjan). À ces différents endroits, on est sûr d'atteindre nos cibles qui sont les Européens, surtout les Français et les autorités ivoiriennes", poursuit-il.
Le livre de 190 pages, écrit depuis la prison de La Haye dont il est pensionnaire depuis deux ans, retrace les cinq mois de la crise postélectorale 2010-2011 qu'a traversée la Côte d'Ivoire suite au refus de l'ex-chef d'Etat Laurent Gbagbo de reconnaître la victoire de son adversaire Alassane Ouattara.
"De l'enfer, je reviendrai" est une série d'entretiens avec un de ses avocats, Me Simplice Séri Zokou, du barreau de Bruxelles.
Arrêté en janvier 2013 au Ghana après plus d'un an et demi de cavale, Blé Goudé a séjourné plusieurs mois dans les locaux de la DST (Direction de surveillance du territoire) à Abidjan, avant son transfèrement le 23 mars 2014 à la CPI.
C'est à la DST qu'il a fait la connaissance du jihadiste.
L'ouvrage de cet ancien ministre de l'ex-président Gbagbo (tous les deux comparaissent devant la CPI pour leur rôle présumé dans la crise) est paru deux jours après la publication par les autorités ivoiriennes de l'identité du principal suspect (Kounta Dallah) de l'attaque jihadiste du 13 mars, qui a fait 19 morts à Grand-Bassam, une station balnéaire ivoirienne.
Quinze personnes ont été arrêtées dans le cadre de l'enquête.
Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a revendiqué l'attaque perpétrée à Grand-Bassam, en réponse à l'opération antijihadiste au Sahel menée par la France et ses alliés.