Les juges du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) ont commencé jeudi la lecture de leur jugement contre l'ultranationaliste serbe Vojislav Seselj, accusé de crimes contre l'humanité, qui les défiait depuis Belgrade.
"J'ai dormi comme un bébé, je n'ai aucun problème de conscience", a-t-il affirmé sur Twitter, ajoutant être "frais et reposé".
L'accusé, qui s'est défendu seul pendant son procès, doit même organiser une conférence de presse après le jugement, à Belgrade, où il réside depuis sa mise en liberté provisoire en 2014 pour "raisons de santé".
L'homme, connu pour sa violence verbale pendant les guerres qui ont déchiré l'ex-Yougoslavie pendant les années 90, est accusé de neuf crimes de guerre et crimes contre l'humanité pour avoir "propagé une politique visant à réunir tous +les territoires serbes+ dans un Etat serbe homogène, qu'il appelait la +Grande Serbie+".
"Cet Etat devait englober la Serbie, le Monténégro, la Macédoine et de vastes portions de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine", assure le procureur, ajoutant que Seselj a donc commis ou encouragé des crimes pour forcer la majorité des non-Serbes à quitter ces territoires.
Ce jugement intervient une semaine après la condamnation de l'ancien chef politique des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic, à 40 ans de prison pour génocide et neuf autres accusations de crimes contre l'humanité et crimes de guerre.
En liberté en Serbie, où il est la tête de liste de son parti pour les élections législatives anticipées convoquées pour le 24 avril, il avait affirmé que ce jugement était "contre la nation serbe".
Karadzic "a été condamné alors qu'il était innocent", avait-il ajouté, devant une foule de nationalistes serbes.
- 'Manipulateur' -
C'est la première fois que les juges du TPIY rendent un jugement de première instance en absence de l'accusé. Fin mars, il avait encore défié l'Occident lors d'une manifestation en incendiant les drapeaux de l'Otan, de l'Union européenne, des États-Unis et du Kosovo.
Il refuse de revenir à La Haye, où les juges ont accepté son absence pour "raisons de santé". A l'exception de l'un d'entre eux, qui a reproché à la Serbie de ne pas avoir arrêté l'ancien député. Belgrade était "peu enthousiaste, au minimum", a-t-il affirmé.
"Le tribunal de La Haye est coupable de l'avoir libéré avant le jugement", accuse Manda Patko, de l'association des "Mères de Vukovar". Seselj était "un sérieux manipulateur" de la communauté internationale, a-t-elle affirmé à l'AFP.
Le procureur évoque, dans son acte d'accusation, des persécutions, des transferts forcés, des meurtres, des tortures et des destructions de bâtiments religieux ou d'écoles.
Vojislav Seselj aurait participé à cette entreprise criminelle commune en compagnie de plusieurs responsables serbes, dont l'ancien président Slobodan Milosevic, décédé dans sa cellule de La Haye en 2006.
Le procès de Vojislav Seselj, 61 ans, s'était ouvert en 2006 mais avait été annulé après quelques audiences, l'accusé ayant entamé une grève de la faim. Le procès recommence en 2007 et se termine en 2012, après 175 jours d'audiences.
M. Seselj, qui ne reconnaît pas la compétence du TPIY, n'a pas présenté de preuves à décharge. L'accusation avait requis 28 ans de détention.
Lors de sa plaidoirie, M. Seselj, qui se défend seul, avait assuré que les Croates avaient "commencé" la guerre, tandis que les Serbes n'avaient fait que répondre.
Pendant son procès, il a déjà été condamné à trois reprises - à deux ans, 18 mois et 15 mois de prison - après avoir divulgué des informations confidentielles concernant des témoins protégés qui avaient déposé.