Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) a suspendu indéfiniment le procès de l'ancien chef politique des Serbes de Croatie, Goran Hadzic, qui avait bénéficié l'an dernier d'une remise en liberté provisoire en raison d'un cancer du cerveau, a-t-on appris mardi.
"La chambre déclare que Goran Hadzic n'est pas en condition pour comparaître lors d'un procès et suspend indéfiniment les procédures", ont affirmé les juges dans une décision prise de manière confidentielle le 24 mars et publiée mardi sur le site du TPIY.
Atteint d'un cancer du cerveau, Goran Hadzic, 57 ans, avait bénéficié en avril 2015 d'une mesure de libération provisoire et était rentré en Serbie pour y être soigné. Depuis, il vit dans sa ville de Novi Sad, à 70 km au nord de Belgrade.
Goran Hadzic était en 1992 et 1993 le "président" de la République serbe autoproclamée de Krajina, qui couvrait environ un tiers du territoire de la Croatie.
Au moment de son arrestation en juillet 2011, il était le dernier des 161 inculpés à être recherché par le TPIY, fondé en 1993.
Les rapports médicaux "décrivent une forte détérioration de la capacité de Goran Hadzic à communiquer", soulignent les juges, qui ont pris cette décision à la majorité.
Lors d'un scanner effectué en mai 2015, une nouvelle lésion au cerveau avait été découverte, selon les juges.
Cette lésion provoque une pression intracrânienne, qui, selon les experts médicaux, provoque le déclin visible "de semaine en semaine" des capacités neurologiques de M. Hadzic et de son état de conscience.
Les rapports médicaux ont donc mené les juges à la conclusion que Goran Hadzic n'était "pas capable d'exercer son droit de recevoir un procès équitable".
Le tribunal reprochait notamment à Goran Hadzic son implication présumée dans les meurtres de centaines de civils croates et la déportation de dizaines de milliers de Croates et autres non-Serbes, dans le but de créer un Etat serbe en Croatie.
Il devait répondre de 14 chefs d'accusation pour des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre commis pendant la guerre de Croatie, dont le tristement célèbre massacre de Vukovar, où 264 personnes ont été abattues après s'être réfugiées dans un hôpital.
Il était également accusé d'être responsable, en octobre 1991, du massacre de civils croates qui avaient été forcés de marcher dans un champ de mines à proximité de la ville de Lovas, dans l'est de la Croatie.
Dans une opinion dissidente, le juge congolais Antoine Kesia-Mbe Mindua a néanmoins regretté cette décision, assurant que "le but d'un procès n'est pas nécessairement de décider d'une condamnation" : "c'est pourquoi, même une personne en phase terminale a le droit d'entendre son jugement, même s'il n'y a aucun espoir de la voir purger une peine de prison".
"Il est nécessaire pour les victimes de voir une détermination légale de l'affaire", a-t-il ajouté.
Son procès pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre s'était ouvert en 2012 mais était suspendu depuis 2014 en raison de son état de santé qui l'empêchait d'assister aux audiences.
Fin mars fut une période de forte activité pour le TPIY, fondé en 1993 : l'ancien chef politique des Serbes de Bosnie Radovan Karadzic a été condamné le 24 mars à 40 ans de détention pour génocide tandis que le 31, l'ultranationaliste serbe Vojislav Seselj était acquitté de tous les chefs d'accusation qui pesaient contre lui.