Le procureur du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie a annoncé mercredi qu'il allait faire appel de l'acquittement de l'ultranationaliste serbe Vojislav Seselj, invoquant des "erreurs de grande envergure" dans la décision des juges.
"Mon bureau a décidé d'interjeter appel du jugement", a indiqué dans un communiqué le procureur Serge Brammertz: "nous considérons que la majorité des juges ont fondamentalement échoué dans l'accomplissement de leur fonction judiciaire".
Aux yeux de ses ennemis, Vojislav Seselj, 61 ans, personnifiait le nationalisme serbe dans les conflits en Croatie (1991-95) et en Bosnie (1992-95), qu'il a alimentés par ses discours enflammés. Les conflits ont fait 20.000 morts en Croatie et 100.000 morts en Bosnie.
Cet ancien député serbe, connu pour sa violence verbale, avait été acquitté le 31 mars, à la surprise générale, de neuf accusations de crimes contre l'humanité et crimes de guerre.
Selon le procureur, Vojislav Seselj avait "propagé une politique visant à réunir tous +les territoires serbes+ dans un Etat serbe homogène, qu'il appelait la +Grande Serbie+". L'accusation assurait en conséquence que Vojislav Seselj était donc responsable de multiples meurtres, persécutions, transferts forcés, et tortures notamment, commis en Bosnie, Croatie et Serbie.
Les juges avaient néanmoins estimé que le fondateur du Parti radical de Serbie (SRS) n'était pas le chef hiérarchique des milices du SRS et que ces discours ne procédaient pas d'un dessein criminel mais étaient destinés à renforcer le moral des troupes.
Les juges ont commis de nombreuses fautes, assure M. Brammertz : ils n'ont pas tenu compte de grandes parties du dossier, ont omis des accusations, n'ont pas appliqué le droit et ont tiré des conclusions "factuellement déraisonnables et contradictoires".
L'acquittement, accueilli triomphalement par l'intéressé, avait provoqué l'ire de Zagreb et ranimé les divisions dans l'ex-Yougoslavie, 20 ans après les conflits sanglants qui suivirent la chute de l'ancienne fédération.
Seselj, 61 ans, s'était rendu volontairement au TPIY en 2003. Son procès s'était ouvert en 2007 et terminé en 2012.
Pendant son procès, il a été condamné à trois reprises - à deux ans, 18 mois et 15 mois de prison - après avoir divulgué des informations confidentielles concernant des témoins protégés qui avaient déposé.
Opéré d'un cancer du côlon à plusieurs reprises, il avait été libéré de manière provisoire en 2014.
Fin mars, Seselj, qui conduit la liste de son parti pour les législatives anticipées du 24 avril, avait défié l'Occident lors d'une manifestation en incendiant les drapeaux de l'Otan, de l'Union européenne, des États-Unis et du Kosovo.