La Grande-Bretagne a affirmé mercredi craindre qu'une bombe n'ait été responsable du crash de l'avion russe dans le Sinaï égyptien, le jour même où le groupe jihadiste Etat islamique (EI) réaffirmait être à l'origine du drame.
Quatre jours après la catastrophe aérienne le 31 octobre, la pire qu'ait jamais connue la Russie, les causes du crash de l'Airbus A321 de la compagnie charter russe Metrojet, qui a fait 224 morts après son décollage de la station balnéaire de Charm el-Cheikh, n'ont pas encore été élucidées.
Au Caire, les enquêteurs ont extrait les données de l'une des deux boîtes noires, après avoir exprimé l'espoir que l'examen des boîtes permettrait de trancher entre les deux hypothèses envisagées pour expliquer le crash: l'attentat ou la défaillance technique.
"Nous ne pouvons toujours pas dire catégoriquement pourquoi l'avion russe s'est écrasé. Mais à la lumière de nouvelles informations, nous avons des craintes que la chute de l'avion ait été provoquée par un engin explosif", a déclaré un porte-parole du Premier ministre David Cameron.
"En conséquence, nous avons décidé, par mesure de précaution, de suspendre les vols entre Charm el-Cheikh et le Royaume-Uni", a ajouté le porte-parole, alors même que le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi arrivait à Londres pour une rencontre jeudi avec le Premier ministre David Cameron.
"Cela donnera le temps aux experts britanniques de l'aviation, en route pour Charm el-Cheikh, d'analyser le dispositif de sécurité à l'aéroport et de vérifier si des mesures supplémentaires sont nécessaires", a-t-il poursuivi.
Après les informations données par le Royaume-Uni, l'autorité d'aviation irlandaise a annoncé avoir demandé à ses compagnies "de suspendre leurs vols vers et en provenance de l'aéroport de Charm el-Cheikh et de ne plus survoler le Sinaï jusqu'à nouvel ordre".
- Nouvelle revendication EI -
L'aéroport de Charm el-Cheikh accueille chaque jour des milliers de touristes venus passer des vacances sur la mer Rouge. Il se trouve dans le Sinaï mais loin du secteur où sévit la branche égyptienne de l'EI, en menant des attaques meurtrières contre les forces de police et de l'armée.
Cette branche qui se fait appeler "Province du Sinaï", a réaffirmé mercredi dans un message sur Twitter être à l'origine de la catastrophe, quatre jours après avoir annoncé qu'elle avait "fait tomber" l'avion. Mais le groupe a ajouté que ce n'était pas à lui d'en faire la preuve et qu'il en livrerait la démonstration quand il le voudrait.
Il a indiqué que "l'attaque" avait été menée en représailles à "l'arrestation de femmes bédouines par les forces apostates" dans la région.
Dans une interview à la BBC avant sa visite à Londres, M. Sissi a prévenu qu'il faudrait "du temps" pour déterminer la cause du crash tout en qualifiant dans le quotidien Daily Telegraph de "spéculations sans fondement" l'idée d'un attentat de l'EI.
L'Airbus A321 qui appartient à la compagnie russe Kogalymavia, plus connue sous le nom de Metrojet, s'est écrasé dans le Sinaï 23 minutes après avoir décollé. Ses occupants, 217 passagers, la plupart originaires de Saint-Pétersbourg, et sept membres de l'équipage, ont tous péri.
Les recherches se poursuivent pour retrouver les derniers corps de victimes et d'éventuels indices dans une large zone désertique. 33 corps ont jusqu'à présent été identifiés.
- Analyse de la boîte noire -
Au Caire, les enquêteurs ont extrait les données contenue dans l'une des deux boîtes noires. "Les données du FDR (enregistreur des données de vol) ont été extraites et validées et doivent être analysées", a dit le ministre égyptien de l'Aviation civile Mohamed Hossam Kamal.
"L'autre boîte noire -le CVR (enregistreur de conversations dans le cockpit)- a été partiellement endommagée et il faudra beaucoup de travail pour en extraire les données", a-t-il ajouté.
Pour la compagnie Metrojet, seul un facteur "extérieur" peut expliquer le crash. Elle a rejeté la possibilité d'"une défaillance technique" ou d'"une erreur de pilotage" et a déclaré que l'avion était en "excellent état".
La chaîne de télévision CNN, citant un responsable américain anonyme, a affirmé qu'un satellite militaire américain avait détecté un "flash de chaleur" provenant de l'Airbus au moment du drame. Cela "suggère qu'un événement catastrophique - y compris peut-être une bombe - s'est produit en vol".
Il est exclu que l'avion ait pu être atteint à près de 10.000 mètres d'altitude par un missile du type de ceux dont dispose l'EI dans le Sinaï. Restent deux hypothèses: un problème technique qui provoque une explosion et une dislocation immédiate de l'appareil ne laissant pas le temps au pilote de communiquer -cas rarissime selon les experts-, ou une bombe, apportée dans l'appareil.
Pour les experts, même un engin explosif de petite taille est suffisant pour ouvrir une brèche dans la carlingue et disloquer l'appareil en raison de la pressurisation à haute altitude.