Nouvelles tensions germano-turques après le vote sur le génocide arménien

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Le gouvernement d'Angela Merkel a insisté lundi pour qu'Ankara lève son opposition à une visite de députés allemands sur une base turque où stationne la Bundeswehr, nouvelle pomme de discorde dans les relations déjà tendues entre les deux pays.

"Il est nécessaire que nos députés puissent se rendre auprès de la Bundeswehr sur la base d'Incirlik" dans le sud de la Turquie, où sont stationnés des soldats allemands dans le cadre de la lutte contre l'organisation Etat islamique, a déclaré à la presse le porte-parole de la chancelière, Steffen Seibert.

La Turquie a récemment empêché la visite d'une délégation de parlementaires allemands sur place, après le vote le 2 juin par les députés allemands d'une résolution reconnaissant le génocide arménien de 1915 sous l'empire ottoman. Une initiative qui a ulcéré Ankara.

 

- 'armée parlementaire' -

Le porte-parole a rappelé que les missions de la Bundeswehr étaient strictement encadrées par les députés allemands, qui ont donc un devoir de contrôle, et même employé à ce sujet l'expression d'"armée parlementaire".

La chancelière est elle-même montée au créneau au cours du week-end, tentant d'obtenir le feu vert de la Turquie lors d'une rencontre en marge du sommet de l'Otan à Varsovie avec le président Recep Tayyip Erdogan. Elle a reçu une fin de non recevoir.

"Les dissensions ne disparaissent pas après seulement un tel entretien", a-t-elle déclaré à l'issue.

Le vice-Premier ministre turc Numan Kurtulmus a justifié lundi le blocage par le fait que des parlementaires n'avaient rien à faire sur un site de l'armée.

"Pour nous il s'agit d'une affaire militaire", a-t-il dit, alors que "du côté allemand la question d'Incirlik ou de l'envoi de soldats allemands est sous l'autorité du parlement allemand (...) la visite n'est pas encore certaine, les discussions continuent".

Mais il ne fait guère de doute qu'il s'agit surtout d'une mesure de rétorsion après le vote du Bundestag sur le génocide arménien.

Selon le quotidien Hurriyet de lundi, le président Erdogan a signifié à Angela Merkel lors de leur entretien du week-end son malaise au sujet de la résolution et lui a dit qu'il attendait que le gouvernement allemand prenne ses distances publiquement avec le texte.

 

- menace de retrait -

 

Face au blocage turc, le ton commence à monter en Allemagne, dont les relations avec la Turquie ont déjà été envenimées récemment par une satire télévisée du président Erdogan diffusée sur une chaîne publique allemande. Le chef de l'Etat a porté plainte contre l'auteur du pamphlet, Jan Böhmermann.  

Les attaques et menaces personnelles dont ont été victimes les députés allemands d'origine turque de la part de médias ou responsables en Turquie ont suscité aussi un vif émoi à Berlin et conduit le président du Bundestag à protester publiquement.

Plusieurs députés ont appelé au retrait des soldats allemands de la base d'Incirlik si Ankara ne devait pas céder.

Cette base aérienne est utilisée par l'Otan dans le cadre de la lutte contre l'EI. Des chasseurs turcs, américains, britanniques mais aussi allemands y sont déployés. Les Tornados allemands sont chargés de mission de surveillance et l'Allemagne contribue aussi au ravitaillement des appareils en vol dans la zone.

Le président Erdogan "risque un retrait de la Bundeswehr par son attitude", a jugé Andreas Scheuer, le secrétaire général de la CSU, la branche bavaroise du parti conservateur d'Angela Merkel.

"Il faut que ce soit clair, un refus durable de la part de la Turquie peut amener la fin de la participation allemande à la mission de l'Otan" sur place, lui a fait écho Niels Annen, du parti social-démocrate.

Angela Merkel préfère pour le moment la voie du dialogue car elle a besoin de la Turquie notamment dans le cadre de l'accord passé avec l'UE pour contenir le flux de réfugiés venant de Syrie vers l'Europe.