Le prix Nobel de la paix attribué vendredi au Président Colombien Juan Manuel Santos cinq jours après l’échec du référendum en Colombie qui devait sceller l’accord de paix entre le gouvernement et les FARC et mettre fin à près de 50 ans de guerre civile auront marqué cette semaine de la justice transitionnelle.
Le Prix Nobel coutumier d’aider des processus de paix fragiles a décerné son prix prestigieux au chef de l’Etat mais aussi au peuple colombien et notamment aux victimes de ce conflit meurtrier. En revanche, les Nobel ont délibérément décidé de ne pas octroyer parallèlement leur prix aux FARC et à leur leader Timoleon Jiménez dit Timochenko dont les méthodes et l’idéologie expliquent en partie le « non » au référendum dimanche dernier. `
Cette victoire du « non » est étroite et inattendue mais indéniable. Le Président Juan Manuel Santos qui avait tout misé dans cet accord et ce scrutin avait dit préférer « une paix imparfaite à une guerre parfaite ». Le gouvernement et les FARC ont tous les deux expliqué que l’accord demeurait valide en l’état mais faute de soutien populaire que l’on pensait massif le processus de réconciliation a du plomb dans l’aile en Colombie. L’étiologie de cette défaite du camp présidentiel est complexe et multiple : rivalité entre Santos et son prédécesseur Alvaro Uribe qui a mis tout son poids pour faire échouer l’accord, peur d’une mainmise « communiste » sur le pays et aussi malaise et inquiétude des Colombiens de voir les responsables de cette guerre notamment les FARC échapper à la justice. L’onction du Prix Nobel pourra sans doute rassurer les partisans du non. Il reste que les Colombiens par leur vote ont voulu signifier que les processus de réconciliation doivent être accompagnés du respect des règles de droit rejetant l’impunité et l’immunité.
Ces principes de base se vérifient tout autant au Burundi où la communauté internationale a averti le président « Pierre Nkurunziza, ses soutiens et toutes les personnes qui ont choisi la voie de la violence que leurs crimes ne resteront pas impunis » pour reprendre les déclarations de Dimitris Christopoulos, nouveau président de la FIDH. Le Conseil des droits de l’homme de l’ONU vient ainsi de créer une commission d’enquête internationale sur les crimes graves commis au Burundi depuis l’année dernière. Le gouvernement burundais classiquement a accusé la Belgique et la France d’être derrière cette résolution. Face à ces menaces, le gouvernement burundais a exprimé son intention de se retirer de la Cour Pénale Internationale. Cette manœuvre pour échapper aux poursuites reste vaine; un éventuel retrait ne serait pas rétroactif.
En Syrie aussi, écrit dans un article de The Conversation repris par JusticeInfo, « La Russie de Poutine et le régime d’Assad ont commis et continuent de perpétrer, jour après jour, des crimes de guerre en Syrie. Cet état de fait a été constaté par le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, par les États-Unis, le Royaume-Uni et la France notamment ». Mais, samedi encore, le Conseil de Sécurité de l’ONU a échoué à imposer un cessez-le-feu à Alep en raison d’un veto russe à une résolution française. L’auteur de l’article de The Conversation Nicolas Tenzer, professeur à Sciences Po, explique que malgré ces condamnations la justice internationale n’a pas le pouvoir de poursuivre Poutine ou Assad.
Plus positivement, la Cour Pénale Internationale a décidé d’étendre son champ de compétence aux crimes écologiques et aux accaparements de terre. Le Cambodge est un exemple type de cette nouvelle catégorie juridique. Dans ce pays, déplore Richard Rogers de Global Diligence interrogé par JusticeInfo, il y a, « des accaparements massifs de terres et des crimes associés de transfert forcé de population, emprisonnement illégal et parfois de meurtres commis par l’élite dirigeante contre les civils ».« Cela dure depuis 15 ou 20 ans », indique l’avocat britannique, soulignant que l’échelle et la nature systématique en font des crimes contre l’humanité ».