La décision du Burundi de quitter la Cour Pénale Internationale (CPI) a dominé la semaine de la justice transitionnelle. Formellement, le Parlement à la botte du Président Nkurunziza a voté cette mesure à une écrasante majorité espérant que les maitres du pays échappent aux poursuites de la Cour qui a menacé de poursuivre les dirigeants burundais pour diverses graves violations des droits humains. Un retrait du Burundi de la CPI serait une première dans l'histoire de la Cour jalonnée de rapports tendus avec l’Afrique qui s’estime disproportionnellement visée par le tribunal de la Haye.
Juridiquement, la manœuvre du Burundi en proie à une violente répression depuis la réélection contestée du Président Nkurunziza à l’été 2015 ne met pas le régime à l’abri de la Cour. Le traité de Rome prévoit un délai d’un an avant que la décision prenne force et la CPI peut poursuivre un pays non membre si le Conseil de Sécurité en décide.
Cette décision souligne l’isolement du régime qui refuse aussi de coopérer avec l’ONU après la publication d’un rapport accablant du Conseil des Droits Humains mettant en cause le régime.
Le 20 septembre, un rapport avait accusé Bujumbura d'être responsable de graves violations des droits, systématiques et constantes, et mis en garde contre de possibles "crimes contre l'humanité" et un "grand danger de génocide".
Dix jours plus tard, le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU avait annoncé l'ouverture d'une enquête visant notamment 12 personnalités du régime burundais, dont le numéro deux du pouvoir, le général Alain-Guillaume Bunyoni.
Ces réactions du pouvoir burundais montre aussi que la justice internationale et la CPI, souvent décriées peuvent avoir un véritable impact sur des dirigeants qui savent qu’ils devront un jour rendre des comptes.
Ce même souci du droit se retrouve en République Centrafricaine où l’ONU s’inquiète des violences récurrentes et des retards pris par le Président nouvellement élu Faustin Touadéra à instaurer une forme de justice transitionnelle. « Pour parvenir à une paix et une stabilité durables, la réconciliation nationale doit aller de pair avec des mesures de lutte contre l’impunité », souligne Ban Ki-Moon, dans un rapport. Le secrétaire General de l’ONU craint que « la lutte contre l’impunité continue d’être entravée (…) par le manque de volonté politique ou encore les allégations de partialité ». Et de demander « la mise en place rapide de la Cour pénale spéciale ».
Pour l ‘heure, la RCA s’enfonce de nouveau dans une vague de violences et est très loin d’instaurer les bases d’un Etat de droit dans un pays à reconstruire.
En République Démocratique du Congo, la justice demeure tout autant douteuse. Un chef de guerre Gédéon Kyungu Mutanga condamné à la peine capitale commuée en prison à vie pour « crimes contre l’humanité, crimes de guerre » dans l’ancienne province du Katanga, dans le Sud-Est du pays est réapparu libre bénéficiant d’une amnistie aussi politique que contestée. Cette libération a été critiquée par les ONG locales qui soulignent en revanche que les victimes de ces milices attendent toujours réparations et compensation.
Toujours en RDC, ce sont les enfants soldats de l’Ituri qui attendent eux aussi réparations de la CPI. La Cour pénale internationale a ainsi tenu la semaine dernière ses premières audiences de son histoire sur les réparations aux victimes de Thomas Lubanga, ancien chef de l’Union des patriotes congolais (UPC) reconnu coupable d’avoir envoyé des enfants de moins de 15 ans faire la guerre en Ituri, dans l’est du pays. Mais plus de quatre ans après sa condamnation à 14 ans de prison, les victimes devenus des adultes attendent toujours réparations. « Pour moi, c’est abandonner la lutte
Et les principes », a dit devant la Cour, Luc Walleyn. L’avocat de ces enfants devenus adultes y voit « une prime au condamné », car « on ne pourra jamais calculer ce que coûte d’être enrôlé six mois dans une milice. Comment calcule-t-on une jeunesse perdue ? »