Le media indépendant IRIN consacré aux problématiques de l'humanitaire a ouvert officiellement ses bureaux à Genève le 12 octobre. Le site bilingue indépendant depuis 2 ans de l'ONU qui s’était focalisé ces derniers mois sur la levée de fonds, a pu ouvrir des bureaux à Genève et recruter des journalistes grâce au soutien financier des gouvernements suisse et suédois, de la Loterie Suisse notamment. Le réseau de 200 journalistes correspondants semble être la fierté du média, mais aussi son originalité. Car sa directrice Heba Aly l’assure : « IRIN fait partie des rares médias à offrir une information indépendante et de haute qualité, ce que ne sont plus capables de faire les médias dominants en déclin ces deux dernières décennies. Avec notre équipe d’experts, on compte parler de sujets moins populaires et moins visibles. »
Au cours de l’événement, les échanges se sont rapidement focalisés sur les crises humanitaires que traverse le monde actuel : crise des migrants et conflits armés, et sur ces points l’installation officielle d’IRIN semble faire peser sur ce media beaucoup d’attentes. L’ambassadeur suisse aux Nations Unies Valentin Zellweger considère par exemple que le rôle d’IRIN est crucial dans la lutte contre les préjugés à l’encontre des réfugiés qui subissent une couverture médiatique quasi-inexistante. Selon lui, c’est cette indépendance qui rend IRIN plus efficace sur ce terrain. De même, Yves Daccord le directeur général du Comité International pour la Croix Rouge (CICR) parle d’une « révolution entre le CICR et les personnes que le CICR essaie d’aider. Les gens que nous aidons sont aujourd’hui connectés, ce ne sont plus des pauvres gens comme les médias les ont dépeints il y a vingt ans. Pour eux, nous sommes des fournisseurs de services, ils nous défient, nous comparent. Cela tient aussi au fait qu’il y a un énorme décalage entre les mesures que nous prenons et les besoins réels des gens. IRIN doit par son travail nous aider à comprendre ces personnes et identifier leurs besoins, pour permettre d’ajuster nos pratiques. »
Cette inquiétude sur les crises humanitaires s’est aussi clairement ressentie dans la salle quand le public a interrogé les experts sur la Syrie, le Yémen, le Burundi ou encore la Libye. Cette fois, c’est une opportunité pour les éditeurs d’IRIN tels qu’Obi Anyadike ou Kristy Siegfried de démontrer leur connaissance du terrain, ou encore l’efficacité d’IRIN dans son travail d’investigation grâce notamment à son réseau de plus de deux-cents correspondants à travers le monde. Sur la Syrie par exemple, un membre du panel et journaliste d’IRIN explique comment la réalité sur le terrain est bien plus compliquée que ce que relatent les médias occidentaux « biaisés » car ils n’évoquent que le point de vue des rebelles syriens. Ce travail d’enquête a permis de dresser un rapport sur les convois humanitaires en Syrie, ce qui est donné et ce qui est réellement utile à la population. L’IRIN révèle en outre qu’en janvier, l’OCHA a financé un projet de l’organisation de bienfaisance dirigée par l’épouse du président syrien, Asma al-Assad. C’est dire l’importance pour IRIN d’être en dehors du système onusien pour mieux analyser les crises, et au plus près des personnes touchées par ces conflits.
Cet évènement fut aussi l’occasion pour la directrice Heba Aly de rappeler l’histoire de ce media. Originairement affilié il y a vingt ans au Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires des Nations Unies (OCHA), l’IRIN a décidé de devenir un media indépendant en 2015. Devenu une association suisse en 2016, c’est tout naturellement que le media prend ses quartiers à Genève. Si la directrice a insisté sur les difficultés rencontrées ces deux dernières années (Irin qui avait reçu en 2015 2 millions de $ sur 25 millions promis de la Jynwel Charitable Foundation détenue par Joh Taek Low un financier malaisien embarqué dans un scandale financier a depuis rompu toutes relations avec cette entité), celles-ci semblent aujourd’hui presque oubliées.