A l'appel de la société civile, la capitale centrafricaine, Bangui, est restée paralysée le lundi 24 octobre. Selon certaines sources, quatre civils ont été tués par des Casques bleus lors de cette journée ville morte organisée malgré l'opposition du gouvernement. Autorités centrafricaines et Nations unies sont unanimes : les organisateurs de la journée ville morte sont manipulés par les ennemis de la paix cherchant à décourager les donateurs potentiels de la Centrafrique qui doivent se réunir le mois prochain à Bruxelles. Cette ancienne colonie française traverse depuis trois ans une crise aiguë marquée par la multiplication de graves violations des droits de l'homme dont certains auteurs circulent encore librement sous les yeux des nouvelles autorités issues des urnes.
Largement observée à Bangui, cette journée ville morte était organisée à l'appel du Groupe de travail de la société civile (GTSC) conduit par l'ex – membre de l'Assemblée nationale de transition, Gervais Lakosso, qui ne cesse de dénoncer l'incapacité du nouveau président Faustin-Archange Touadéra à stabiliser le pays et à faire traduire en justice les auteurs des crimes graves commis dans le pays depuis trois ans. Selon Lakosso, l'opération du 24 octobre, que le gouvernement avait tenté en vain d'interdire, visait en particulier à exiger « le retrait des Casques bleus de la Minusca », accusés, comme le gouvernement Touadéra, d'avoir « failli à leur mission de protection des populations civiles ».
L'organisation de cette journée ville morte a été dénoncée par le ministre de l'Equipement et porte-parole du gouvernement, Théodore Jousso, comme une manipulation de la part d'hommes politiques incapables de digérer leur défaite aux élections de la fin de l'année dernière. Dans une allusion à peine voilée à l'Union pour le renouveau centrafricain (URCA) de l'ancien premier ministre Anicet Georges Dologuélé battu au deuxième de la présidentielle par le nouveau chef de l'Etat Faustin-Archange Touadéra, le ministre Jousso a affirmé que les personnalités derrière la manifestation du 24 octobre veulent faire échouer « la conférence des donateurs prévue le 17 novembre prochain à Bruxelles en Belgique » et dont Bangui attend « les solutions appropriées pour atténuer les souffrances de nos populations ».Pour le porte-parole du gouvernement, « cette perspective tant redoutée par les hommes politiques aigris de leurs propres échecs, est à l'origine de ce déferlement de violence inouïe observée sur l'ensemble du territoire national ».
« Réclamer le départ de la Minusca est inapproprié »
Pour sa part, la Mission de l'ONU en Centrafrique (Minusca) a affirmé qu'elle n'elle ne cèderait pas à la pression des organisateurs de la journée ville morte. Le porte-parole de la mission, Vladimir Monteiro, a indiqué, dans une note d'information publiée mercredi 26 octobre, que la présence de la Minusca « reste essentielle pour permettre aux autorités centrafricaines de relever les nombreux défis sécuritaires ». « La Minusca estime que réclamer son départ est une demande inappropriée », a- t -il affirmé, soulignant « qu'il reste beaucoup de défis sécuritaires (qui) ne peuvent être relevés qu'avec l'aide des forces internationales de la Minusca et de la communauté internationale ».
Il a enfin promis l'appui de la mission de l'Onu pour « faire la lumière sur les circonstances des évènements » du lundi 24 octobre, « qui ont causé », selon lui, quatre morts et 14 blessés, dont cinq Casques bleus. « Nous attendrons les résultats des enquêtes et s'il est établi une quelconque responsabilité (de la Minusca), nous prendrons nos responsabilités », a –t- il assuré.
A New York, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a fustigé des actes ourdis par « ceux dont l'objectif est de déstabiliser le gouvernement et de nuire aux perspectives de paix et de stabilité dans le pays ».
Insidieusement mis en cause, l'Union pour l'URCA, le parti d'Anicet Georges Dologuélé, candidat malheureux à la dernière présidentielle, a, dans un communiqué, appelé « tous les leaders de partis politiques, de la mouvance présidentielle comme de l'opposition, à solliciter une rencontre avec le Chef de l'Etat, pour que des explications soient données sur les circonstances réelles de ce dramatique événement ». L'URCA indique disposer d'informations selon lesquelles les dégâts humains du 24 octobre à Bangui sont le fait d'éléments de la force de l'ONU affectés à la sécurité de Parfait Onanga-Anyanga, représentant spécial du secrétaire général de l'ONU.