Le Bangladesh a renforcé la sécurité sur tout son territoire dimanche dans la crainte de violences après l'exécution par pendaison de deux personnalités de l'opposition condamnées pour des crimes commis lors de la guerre d'indépendance de 1971 d'avec le Pakistan.
Des milliers de policiers et de gardes-frontières ont été déployés en renfort à Dacca et dans les principales villes du pays alors que l'opposition a appelé à une grève générale lundi pour protester contre ces exécutions, selon des responsables de la sécurité.
Les deux hommes ont été pendus quelques heures après le rejet par le président Abdul Hamid de leurs demandes de grâce, à 00H45 (18H45 GMT), selon le ministre de la Justice Anisul Huq.
Ali Ahsan Mohammad Mujahid était le numéro deux du plus important parti islamiste du pays, Jamaat-e-Islami, et Salahuddin Quader Chowdhury était un proche conseiller de Khaleda Zia, la chef du principal parti d'opposition, le parti nationaliste du Bangladesh.
Des centaines de policiers ont été déployés devant la centrale pénitentiaire de Dacca où les exécutions ont eu lieu. La sécurité a également été nettement renforcée dans les villes d'origine des deux condamnés, dont les funérailles ont eu lieu dans la matinée.
"Nous avons renforcé la sécurité à travers le pays pour empêcher toute violence, y compris le long des routes qui ont acheminé les dépouilles", a déclaré à l'AFP, Munstashirul Islam, un porte-parole de la police.
Un journaliste de télévision souffre de blessures légères après avoir été atteint par des tirs à Raojan quelques heures après l'enterrement de Chowdhury, a rapporté la chaîne privée bengali Channel 24. Un chef de la police locale a indiqué à l'AFP que ses officiers effectuaient des vérifications pour savoir si l'incident était lié aux exécutions.
- Ultime appel rejeté -
Le Pakistan, dont le Bangladesh était une province, a été l'un des premiers pays a réagir à ses exécution et s'est dit "profondément inquiet de ses développements", tout en appellant à une réconciliation nationale.
La condamnation à mort des deux hommes en 2013 avait suscité les plus graves violences dans le pays depuis son indépendance. Quelque 500 personnes avaient été tuées, principalement dans des affrontements entre des militants du Jamaat-e-Islami et la police.
Après l'annonce des pendaisons, des partisans de la Ligue Awami, le parti du la Première ministre du Bangladesh Sheikh Hasina, sont descendus dans les rues de Dacca pour manifester leur satisfaction.
Mujahid, 67 ans, accusé du meurtre d'intellectuels de premier plan lors de la sanglante guerre d'indépendance de 1971, avait été condamné à mort pour crimes de guerre.
Chowdhury, 66 ans, ancien député, avait été condamné pour des atrocités commises pendant la guerre d'indépendance, notamment pour génocide.
"J'ai attendu ce jour pendant 44 ans", a déclaré Mahmud Shawan, fille du musicien et activiste Altaf Mahmud, tué par la milice islamiste Al Badr, dirigée par Mujahid.
Mercredi, la Cour suprême du Bangladesh avait rejeté l'ultime appel des condamnés, confirmant leur condamnation à mort prononcée par un tribunal spécial très controversé mis en place par le gouvernement en 2010. Dix-huit dirigeants de l'opposition ont été condamnés par ce tribunal spécial.
Le Jamaat a qualifié de "farce" le procès de Mujahid, destinée selon le parti islamiste à "éliminer" ses dirigeants.
Les organisations étrangères de défense des droits de l'Homme ont critiqué le tribunal spécial mis en place par le gouvernement, estimant qu'il ne respectait pas les normes internationales en matière de justice.
L'organisation de défense des droits l'Homme Human Rights Watch basée à New York avait appelé vendredi le Bangladesh à surseoir à "l'exécution imminente" des deux opposants.
Mme Hasina, dont le père Sheikh Mujibur Rahman avait dirigé le mouvement d'indépendance, affirme que trois millions de personnes ont été tuées au cours du conflit de 1971.
La guerre avait débouché sur la naissance du Bangladesh, qui était depuis 1947 une province du Pakistan appelée Bengale oriental, puis Pakistan oriental.