Toute la clarté n'était pas encore faite sur l'attentat au camion-bélier ayant tué lundi douze personnes sur un marché de Noël à Berlin que le président élu américain Donald Trump y voyait déjà la confirmation de ce qu'il considère comme une guerre de religions à l'échelle mondiale.
"Des civils innocents ont été tués dans les rues alors qu'ils se préparaient à fêter Noël", a-t-il déclaré lundi soir dans un communiqué.
Le groupe "Etat islamique et d'autres terroristes islamistes attaquent continuellement les chrétiens au sein de leurs communautés et lieux de culte dans le cadre de leur jihad mondial", a-t-il poursuivi.
Ce faisant, il a rompu avec la façon dont réagissent la plupart des dirigeants occidentaux face à l'extrémisme violent, mais il est resté fidèle à sa ligne de campagne.
M. Trump, qui doit prendre ses fonctions le 20 janvier, a tiré et communiqué publiquement ses conclusions avant que la police allemande ne libère mardi un demandeur d'asile pakistanais après l'avoir mis hors de cause. Et avant également que l'EI ne revendique mardi l'attentat dans son agence de propagande Amaq.
Le futur président américain a employé le même registre pour condamner l'assassinat lundi de l'ambassadeur de Russie en Turquie par un "terroriste islamique radical".
Mettre ainsi l'accent sur la religion présumée des assaillants constitue un choix délibéré de trancher avec la politique du président sortant Barack Obama.
Ce dernier a appelé mardi la chancelière allemande Angela Merkel pour lui présenter ses condoléances après cette "horrible attaque terroriste présumée".
Son administration combat "l'extrémisme violent", mais souligne que les extrémistes ne représentent pas une religion.
Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a été jusqu'à qualifier les membres du groupe Etat islamique d'"apostats" ayant perverti le message d'une grande religion.
- 'Cancer insidieux' -
Mais la conviction de Donald Trump et de ses conseillers diffère: pour eux, l'extrémisme ne peut être défait que s'il est identifié comme une excroissance de l'islam.
Pendant sa campagne électorale, l'homme d'affaires a souhaité interdire à tous les musulmans d'entrer aux Etats-Unis, au moins "jusqu'à ce que nous soyons capables de comprendre ce qui se passe".
Son conseiller à la sécurité nationale, l'ancien général Michael Flynn, a affirmé en août que l'islam n'était pas une religion mais une "idéologie politique". "Ils nous ont déclaré la guerre", affirmait-il alors. "Et notre gouvernement ne nous permet pas de parler de cet ennemi".
"C'est l'islamisme", avait-il dit au sujet de cette menace. "C'est un cancer insidieux dans le corps de 1,7 milliard d'habitants sur cette planète et il doit être retiré".
Mais cet ancien soldat qui a combattu les extrémistes en Irak et en Afghanistan n'est pas le seul à avoir l'oreille de Donald Trump. Steve Bannon, un très proche et futur conseiller en stratégie, incarne une vision nationaliste aux racines dans l'extrême droite très dure.
M. Bannon dirigeait le site d'information Breitbart, considéré comme la plaque tournante de la "droite alternative", mouvement associé aux idées nationalistes et partisan de la supériorité de la "race blanche", avant de rejoindre en août la campagne Trump.
L'attentat de Berlin dominait la page d'accueil du site mardi, insistant sur les critiques de la politique d'accueil de réfugiés musulmans de Mme Merkel.
En 2014, Steve Bannon avait participé par liaison vidéo à une conférence conservatrice au Vatican, saluant notamment "le capitalisme éclairé de l'Occident judéo-chrétien".
"Nous sommes engagés dans une guerre pure et simple contre le fascisme jihadiste islamique", avait-il affirmé, selon une retranscription publiée par Buzzfeed News. "Et cette guerre est, je pense, en train de métastaser beaucoup plus vite que ce que les gouvernements peuvent gérer".
La victoire de Donald Trump le 8 novembre va faire entrer cette vision du monde à la Maison Blanche, mais le futur conseiller en stratégie voyait plus loin lorsqu'il parlait en 2014.
Selon lui, les partis populistes de droite comme le Front National en France et l'UKIP au Royaume-Uni vont supplanter les conservateurs de centre-droit.