Le Parlement colombien a approuvé mercredi 28 décembre 2016 la loi d'amnistie des Farc, premier pas vers la concrétisation de l'accord de paix signé avec cette guérilla afin de mettre fin à plus de 52 ans de confrontation armée.
"Premier pas pour la consolidation de la paix, grâce au Congrès qui a approuvé la Loi d'amnistie par un vote historique", a réagi le président Juan Manuel Santos sur son compte Twitter.
La loi a été approuvée par 69 voix pour et 0 contre au Sénat, qui compte 102 sièges, et auparavant par 121 pour et 0 contre à la Chambre des représentants, composée de 166 députés.
Ce texte, qui prévoit l'amnistie ou la grâce aux membres des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes) accusés de délits politiques ou connexes, était prévu par l'accord de paix signé le 24 novembre pour mettre fin à plus de 52 ans de confrontation avec la plus importante et plus ancienne guérilla du pays.
"Nous saluons l'approbation de la loi d'amnistie qui est un pas de plus sur le long chemin que nous empruntons pour amener les Colombiens vers la paix", a tweeté le chef des Farc, Rodrigo Londoño, plus connu sous ses noms de guerre "Timoleon Jimenez" ou "Timochenko".
A partir de maintenant, quelque "5.700 guérilleros vont commencer à quitter les montagnes et à rendre leurs armes", a déclaré le président du Sénat, Mauricio Lizcano, dans un communiqué.
Pas d'amnistie pour les crimes graves
Les auteurs de crimes contre l'humanité, de massacres ou/et de viols ne pourront pas bénéficier de cette loi et devront se soumettre à la juridiction spéciale de paix, également prévue par l'accord, qui pourra les condamner à des peines alternatives à la prison à condition qu'ils disent toute la vérité sur les faits qui leur sont reprochés.
"Les crimes graves contre l'humanité ne feront pas l'objet de l'amnistie. Ce projet contribue au renforcement de la recherche de la paix", a rappelé le ministre de la Justice, Jorge Eduardo Londoño, devant les députés.
Les parlementaires du Centre démocratique, le parti de l'ex-président et actuel sénateur de droite Alvaro Uribe, étaient contre l'amnistie et se sont abstenus de voter, ainsi qu'ils l'avaient déjà fait lors de la ratification de l'accord de paix par le Congrès le 30 novembre.
La loi d'amnistie a été présentée aux deux chambres selon une procédure rapide ou "fast track" prévue pour les textes d'application de l'accord qui permet de réduire le nombre de débats.
Le ministre de l'Intérieur, Juan Fernando Cristo, a estimé que les parlementaires "ont donné, avec cette décision, l'impulsion finale au désarmement et à la démobilisation de la guérilla des Farc".
Du fait de l'incertitude sur le statut judiciaire de leurs troupes, les Farc ont jusqu'ici ralenti le déplacement des guérilleros vers les zones de rassemblement, où ils doivent déposer les armes dans un délai de six mois, sous supervision de l'ONU.
5.000 forces de l'ordre concernés
Selon l'accord, ils devaient être tous regroupés au 31 décembre. Mais le gouvernement et la guérilla ont annoncé un peu plus tôt mercredi que les 26 zones de rassemblement prévues à travers le pays n'étaient pas prêtes. Aucune autre date limite n'a été donnée.
Ils ont toutefois précisé que "le 30 janvier au plus tard sera établi le nombre de membres des Farc qui ne peuvent être amnistiés, ni graciés" en raison des crimes qui leur sont reprochés, et dans quelles zones ils seront transférés.
La loi d'amnistie s'appliquera aussi aux agents de l'Etat et aux civils "condamnés, jugés ou accusés d'actes répréhensibles (...) en relation directe ou indirecte avec le conflit armé", dont environ 5.000 membres de la force publique, selon le ministre de la Défense, Luis Carlos Villegas.
Depuis les années 1960, le conflit armé colombien a impliqué une trentaine de guérillas de gauche, des paramilitaires d'extrême droite et les forces de l'ordre, faisant au moins 260.000 morts, plus de 60.000 disparus et 6,9 millions de déplacés.
Il reste au gouvernement à entamer des pourparlers de paix avec l'Armée de libération nationale (ELN, guévariste), seule guérilla à ce jour active, issue comme les Farc d'une insurrection paysanne en 1964 et qui compte encore environ 1.500 combattants. Les discussions préalables à ces négociations doivent reprendre le 10 janvier.