Le Mali peine toujours à mettre en œuvre l'accord de paix signé il y a déjà plus de 18 mois, en vue de ramener la paix dans sa partie septentrionale. Pour tenter de sortir le processus de l'enlisement, la médiation internationale annonce la tenue prochaine d'une réunion de haut niveau, à laquelle les principaux protagonistes devront être représentés par leurs chefs et non plus par des lieutenants.
A l'ouverture, le 30 janvier, des travaux de la 15e session du Comité de suivi de l'accord (CSA), la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA), l'une des trois parties signataires, manquait à l'appel. Bien que cette absence l'ait un peu énervé, le président du Comité de suivi, Ahmed Boutache, qui représente l'Algérie à Bamako, n'a pas été surpris. La CMA avait en effet annoncé depuis plusieurs jours qu'elle suspendait sa participation aux travaux du Comité de suivi. Les responsables de cette alliance d'ex-rébellions à majorité touareg dénoncent la lenteur et la confusion qui règnent autour de la mise en œuvre de l'accord.
Dans le camp d'en face, les représentants de la Plateforme (regroupant des mouvements progouvernementaux) ont fait un peu mieux, en se présentant à l'ouverture pour ensuite claquer la porte avant la fin de cette première journée, en guise de protestation contre certains agissements de l'opération française Barkhane.
Sous la conduite du diplomate algérien, la médiation internationale a tout de même réussi à mener des entretiens séparés avec les représentants du gouvernement, ceux de la Plateforme et ceux de la CMA.
A l'issue de ces entretiens, le 31 janvier, l'ambassadeur d'Algérie a annoncé la tenue prochaine d'une réunion de haut niveau du Comité de suivi de l'accord, une rencontre à laquelle participeront les ministres des pays impliqués dans le processus et surtout les dirigeants politico-militaires des différents mouvements signataires. Ahmed Boutache a annoncé qu'il allait présider en personne un groupe de travail chargé de préparer cette rencontre de haut niveau sur laquelle mise la médiation internationale. « La réunion aura lieu, l'accord de principe est là et des consultations sont en cours pour en arrêter la date. Ce sont les ministres concernés au niveau des pays partenaires qui seront invités à cette réunion. S'agissant des mouvements, ils seront invités et il sera particulièrement insisté sur le fait que la participation doit être impérativement assurée au plus haut niveau de responsabilité, c'est à dire par les dirigeants politico-militaires », a assuré le diplomate dans un entretien avec Studio Tamani.
La nécessité de « se parler »
Il a insisté sur la nécessité pour les hauts responsables de ces groupes armés de « se parler » pour faire avancer le processus. « Je pense que le groupe de travail qui sera mis en place va travailler sur l'élaboration d'un certain nombre de propositions qui seront examinées au niveau de la réunion ministérielle du CSA, laquelle validera ses résultats, notamment en ce qui concerne la mise en place d'un cadre effectif et efficace de consultation de dialogue entre les parties maliennes ».
Le diplomate algérien n'a pas manqué de critiquer l'absence de la CMA aux travaux de la session, une attitude qu'il a jugée « irresponsable », expliquant que le dialogue est le seul cadre idoine pour aplanir les différends. S'agissant de la plainte de la Plateforme contre les soldats français, il a affirmé que le Comité de suivi n'était pas le cadre approprié pour poser ce problème.
Cette annonce d'une rencontre de haut niveau a en tout cas été saluée par la CMA qui la réclamait. « C'est une très bonne décision, le signal est très positif. Nous l'accueillons positivement. Maintenant, il faut préparer cette réunion. Tous ses contours et le contenu, pour qu'elle ne soit pas une rencontre de plus, pour que ce soit une réunion constructive », a réagi Ilad Ag Mohamed, porte parole de la CMA, joint au téléphone par Studio Tamani.
Interrogé par RFI, Habala Ag Hamazata, l'un des porte-parole de Plateforme, a également confirmé la participation de cette dernière, même si elle n'avait pas demandé une telle rencontre.
Conclu après de longues négociations à Alger, l'accord de paix inter-malien a été signé en mai 2015 par le gouvernement de Bamako et la Plateforme, regroupant des groupes qui lui sont favorables. Un mois plus tard, le texte était signé par la CMA, une ex-rébellion à dominante touareg.
Selon Hervé Ladsous, secrétaire général adjoint de l'ONU chargé des opérations de la paix, « très peu d'avancées significatives ont été enregistrées » depuis. Le responsable onusien s'interroge d'ailleurs «sur la volonté réelle et l'engagement des signataires du processus de paix ».