La justice française a clôturé son instruction le 9 mai dans le dossier de l’ancien préfet Laurent Bucyibaruta, deuxième affaire confiée à la France par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) qui a fermé ses portes fin décembre 2015, a appris jeudi JusticeInfo.Net. Le Parquet français doit maintenant donner sa position quant à la suite de la procédure.
Le procureur du TPIR avait émis un acte d'accusation contre Laurent Bucyibaruta, ancien préfet de Gikongoro (sud-ouest du Rwanda) pour des chefs de génocide , complicité de génocide, incitation directe et publique à commettre le génocide et des chefs de viol, extermination et assassinat constitutifs de crimes contre l'humanité perpétrés au Rwanda en 1994. L'acte d'accusation avait été confirmé par un juge du TPIR le 17 juin 2005.
Suite à une demande du procureur du TPIR, une chambre de ce tribunal a rendu le 20 novembre 2007 une décision renvoyant l’affaire Bucyibaruta à la justice française.
Au moment de cette décision, Bucyibaruta faisait déjà l'objet d'une information judiciaire en France suite à sa mise en examen par un juge d'instruction français après une plainte avec constitution de partie civile déposée en 2000. L’affaire renvoyée par le TPIR a été jointe à l'information judiciaire ouverte en France. Ainsi donc, l’ancien responsable administratif rwandais, en liberté sous contrôle judiciaire en France, fait l’objet d’une seule et même information depuis septembre 2007.
Dans un rapport publié jeudi sur son site internet, le Mécanisme des Nations unies pour les Tribunaux pénaux internationaux (MTPI), chargé d’assurer les fonctions résiduelles du TPIR, indique avoir été informé le 16 mai par la représentante du parquet français, Aurelia Devos, que l’instruction avait été clôturée le 9 mai. Le juge d'instruction a par ailleurs « rendu l'ordonnance communiquant le dossier au Procureur de la République », toujours selon ce rapport de suivi.
« Mme Devos a indiqué que le Parquet était en train de préparer ses réquisitions finales motivées indiquant la position du Ministère public quant à la suite de la procédure » et qu’elle « estimait que les réquisitions pourraient être déposées dans quelques mois », ajoute le MTPI dans son rapport.
Non-lieu dans une précédente affaire renvoyée par le TPIR
Le dossier de Laurent Bucyibaruta a été renvoyé à la France en même temps que celui de Wenceslas Munyeshyaka, qui était vicaire d’une paroisse à Kigali en 1994.
Le prêtre catholique, qui vit également en France, était soupçonné d’avoir livré des civils tutsis aux milices hutus et d’avoir encouragé ou commis des viols.
En octobre 2015, les juges français chargés d'enquêter sur le dossier ont rendu une ordonnance de non-lieu, conformément aux réquisitions du parquet de Paris.
La décision du parquet d’abandonner les poursuites contre Munyeshyaka a vivement indigné les associations rwandaises de survivants du génocide ainsi que des organisations internationales qui s’étaient constituées parties civiles dans l’affaire.
Certaines de ces parties civiles ont interjeté appel contre cette ordonnance. La chambre d’instruction n’a pas encore statué sur ce recours.
En dehors de ces deux affaires confiées par le TPIR, la France, accusée par Kigali d’avoir soutenu le gouvernement hutu en place pendant le génocide, a déjà jugé et condamné, dans deux procès, un ex officier de l’armée rwandaise et deux anciens maires.
Condamné en première instance à 25 ans de prison, le capitaine Pascal Simbikangwa, qui travaillait au service national des renseignements en 1994, a vu sa peine confirmer en appel le 3 décembre 2016. Pour leur part, les anciens maires de Kabarondo (est du Rwanda) Octavien Ngenzi et Tito Barahira ont été condamnés à la perpétuité en juillet 2016. Ils attendent de comparaître en appel.