Les hommages se multiplient à travers le monde après le décès du Prix Nobel et dissident chinois Liu Xiaobo, mort jeudi d'un cancer, et des critiques s'élèvent contre la Chine, qui ne l'a pas autorisé à se faire soigner à l'étranger.
- Comité Nobel -
La Chine porte "une lourde responsabilité" dans la mort "prématurée" de Liu Xiaobo en l'ayant privant de soins médicaux adaptés, a estimé jeudi le comité Nobel norvégien, qui avait attribué le Nobel de la paix au dissident en 2010.
"Nous trouvons profondément troublant que Liu Xiaobo n'ait pas été transféré dans un établissement où il aurait pu recevoir un traitement médical adéquat avant que sa maladie n'entre en phase terminale", a dit la présidente du comité, Berit Reiss-Andersen.
- Etats-Unis -
Le président américain Donald Trump "a été profondément attristé d'apprendre le décès du lauréat du prix Nobel de la paix et célèbre prisonnier politique chinois Liu Xiaobo", a indiqué la Maison Blanche. Il "a consacré sa vie à la poursuite de la démocratie et de la liberté", a déclaré la présidence.
Le secrétaire d'Etat américain Rex Tillerson a rendu hommage à un homme qui avait "consacré sa vie à l'amélioration de l'humanité". Il a salué le dissident, "mort alors qu'il exécutait une longue peine de prison en Chine pour la défense de réformes démocratiques pacifiques".
M. Tillerson a exhorté Pékin à "libérer" son épouse "Liu Xia de (sa) résidence surveillée et à la laisser quitter la Chine selon son souhait".
- UE -
Le président du Conseil européen Donald Tusk et celui de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, ont réitéré l'appel de l'UE à "la libération de tous les prisonniers de conscience" en Chine.
"Nous avons constamment exprimé notre opposition à sa condamnation et réclamé sa libération", ont rappelé les deux dirigeants européens. "A cette heure, nous appelons les autorités chinoises à permettre à son épouse, Mme Liu Xia, et à sa famille d'enterrer Liu Xiaobo à l'endroit et selon la manière de leur choix, et de les laisser faire leur deuil en paix".
MM. Tusk et Juncker exhortent aussi Pékin à "lever toutes les restrictions à la liberté de mouvement et de communication" des membres de la famille du dissident, et à autoriser notament sa femme à quitter la Chine si elle le souhaite.
- Allemagne -
"Je suis profondément attristée par (la mort de) Liu Xiaobo, le courageux combattant pour les droits civiques et la liberté d'expression. Ma plus profonde sympathie à sa famille", a dit la chancelière Angela Merkel sur Twitter.
Le gouvernement allemand avait appelé mercredi encore Pékin à laisser sortir Liu Xiaobo de son pays et se disait "prêt à l'accueillir".
- France -
"Hommage à Liu Xiaobo, prix Nobel de la paix, grand combattant de la liberté. Pensées et soutien à ses proches et son épouse Liu Xia", a tweeté le président français Emmanuel Macron.
Le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian a exprimé sa "profonde tristesse". "En dépit de longues périodes de détention, il n’a cessé depuis plus de 30 ans de défendre avec courage les droits fondamentaux, et notamment la liberté d'expression".
"La France avait appelé à plusieurs reprises à sa libération et souhaite que les autorités chinoises assurent la liberté de mouvement de son épouse, Mme Liu Xia, de sa famille et de ses proches", poursuit le ministre, rappelant que la défense des droits de l'homme "fait partie de notre dialogue avec la Chine".
- Londres -
"Liu Xiaobo aurait dû être autorisé à choisir son propre traitement médical à l'étranger, ce que les autorités chinoises l'ont empêché de faire à plusieurs reprises", a critiqué le ministre britannique des Affaires étrangères Boris Johnson. "C'était une erreur et je les presse maintenant de lever toutes les restrictions qui pèsent sur sa veuve, Liu Xia".
- Nations unies -
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres est "profondément attristé" et "exprime ses condoléances à sa famille et à ses amis", a déclaré le porte-parole de l'ONU, Stéphane Dujarric. Mais il s'est abstenu de toute critique envers la Chine.
Le Haut Commissaire aux droits de l'homme de l'ONU, Zeid Ra'ad Al Hussein, a aussi rendu hommage à un "champion des principes, qui avait consacré sa vie à la défense et à la promotion des droits humains, pacifiquement et sans relâche, et qui avait été emprisonné pour avoir défendu ses convictions".
Il a demandé au gouvernement chinois d'accorder à son épouse "une liberté de mouvement et (de) l'autoriser à se rendre à l'étranger si elle le souhaite".
- Dissidents chinois -
Ye Du, un dissident proche de la famille de Liu Xiaobo, avait estimé avant son décès que Pékin voulait détenir l'opposant politique "jusqu'à la mort". Hors de Chine, il "aurait pu s'exprimer politiquement en tant que lauréat du prix Nobel, ce qui aurait eu un impact négatif sur le parti et sur le pays", avait-il déclaré à l'AFP.
Chen Guangcheng, célèbre dissident chinois réfugié aux Etats-Unis, a estimé jeudi que Liu Xiaobo avait été "tué par le Parti communiste chinois, délibérément tué par eux". "Il ne faut pas voir cette mort comme une mort naturelle, normale", a déclaré à l'AFP ce dissident, pour qui la soudaineté du décès "crée une énorme suspicion".