Le suicide en pleine audience, - le jour de sa condamnation - du criminel de guerre croate Slobodan Praljak met un point final tragique au Tribunal Pénal Internationale pour l’ex-Yougoslavie. C'est sur ces images diffusées que le TPIY va fermer définitivement ses portes à la fin du mois de décembre. « Un baisser de rideau où la salle d'audience est devenue "scène de crime" », écrit ainsi l’AFP.
Premier tribunal pour les crimes de guerre mis sur pied par les Nations unies et premier tribunal international établi après les procès des responsables nazis à Nuremberg, le TPIY, né au coeur du conflit des Balkans, laisse un héritage considérable mais aussi controversé pour la justice internationale.
Dans un article titré « la saveur amère de la justice dans les Balkans », Pierre Hazan écrit ainsi : « jamais tant de crimes ont suscité un tel travail d’enquête. Jamais une guerre n’a été aussi documentée, scrutée, analysée par le pouvoir judiciaire depuis la 2ème guerre mondiale. Ce travail d’historicisation du TPIY est indispensable, ne serait-ce que pour tirer les leçons pour l’avenir de la justice internationale ».
Au-delà de la fin théâtrale de Slobodan Praljak, « Ce qui frappe avant tout, c’est l’infinie distance entre la vérité judiciaire et l’écho que celle-ci suscite dans les sociétés les premières concernées. Avec courage, mais aussi avec tristesse, le procureur du TPIY est le premier à reconnaître que ceux qui sont glorifiés aujourd’hui, ce sont les criminels de guerre et non leurs victimes », écrit ainsi Pierre Hazan. « Un échec exige une réflexion profonde sur le défi que représente la capacité d’une Cour internationale à faire passer son message dans des sociétés divisées ».
Pourtant, dans une interview publiée par JusticeInfo, le Cardinal Dieudonné Nzapalainga, une des voix les plus écoutées dans cette Centrafrique meurtrie par quatre ans de conflit armé, affirme, sans ambages, qu’il n’y aura pas de paix sans justice. Et d’ajouter : « Dire non à l’impunité, c’est dire non au cycle infernal de violences et au fait que les bourreaux deviendraient des victimes et les victimes deviendraient des bourreaux. Ceux qui ont posé des actes, qui ont divisé, qui ont tué, doivent rendre compte de leurs actes parce qu’il est trop facile de dire : « on passe l’éponge, tout est fini ».
Dans une expression imagée, le prélat dit « non à la casse ».
« Une casse » qui prend chez les enfants une dimension encore plus poignante. Comme le montrent un livre et une exposition itinérante sur les dessins des enfants de la guerre. Notamment au Darfour. Ces dessins précis, poignants, récoltés par Human Rights Watch sont devenus autant de pièces à conviction déposées devant la Cour Pénale Internationale. Françoise Héritier qui a préfacé le livre évoque notamment « le silence assourdissant » que traduisent ces dessins. L’anthropologue française décédée le 15 novembre à Paris et qui signe là l’un de ses derniers textes décrit ainsi : « la réalité obscène (qui) a dû être faire de fureur et de vacarme », ajoutant « rien dans ces témoignages ne relève de l’imagination». Ils sont les figures de la violence universelle.